Page:Saurin - Œuvres choisies, Didot, 1812.djvu/59

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Mais, vous-même de sang inondant cette terre,

N'en avez-vous versé qu'au milieu du combat ?

Tarente, abandonnée aux fureurs du soldat...

Spartacus
l'interrompant.

Eh ! Qui peut prévenir tous les maux dont abonde

La guerre en cruautés, en ruines féconde ?

Par un vil intérêt le soldat excité,

Au désir du butin joint la férocité ;

Et ce sont ces cruels, ces âmes sanguinaires,

Des plus nobles projets instruments mercenaires,

Qu'il faut faire servir au bonheur des humains.

Nous avons trop peut-être imité les Romains ;

Mais en plaignant l'abus j'envisage les suites.

Eh ! Que sont en effet quelques cités détruites,

Quelques champs ravages, si j'atteins à mon but,

Si du monde opprimé leur perte est le salut,

Et si des nations par mon bras affranchies,

Les Biens, les libertés, les honneurs et les vies

Ne sont plus le jouet de ces brigands titrés.

De tous ces proconsuls à qui vous les livrez ?

Messala

Votre projet est grand : mais souffrez qu'on vous dise.

Que le succès encore est loin de l'entreprise ;

Plus d'un obstacle encor vous reste à surmonter,

Et j'ose...

Spartacus
l'interrompant.

Il faut les vaincre, et non pas les compter :

Tout projet qui n'est pas un projet ordinaire

Veut que l'on exécute, et non qu'on délibère.

J'ose tout espérer : les miracles sont faits

Pour qui veut fermement la mort ou le succès.

Messala

À ces grands sentiments il faut que j'applaudisse ;

J'ose vous dire plus, Rome vous rend justice.

Un accommodement se pourrait pressentir.