exprimer une idée ; la langue peut se contenter de l’opposition de quelque chose avec rien ; ici, par exemple, on reconnaît le gén. pl. žen simplement à ce qu’il n’est ni žena ni ženu, ni aucune des autres formes. Il semble étrange à première vue qu'une idée aussi particulière que celle du génitif pluriel ait pris le signe zéro ; mais c’est justement la preuve que tout vient d’un pur accident. La langue est un mécanisme qui continue à fonctionner malgré les détériorations qu'on lui fait subir.
Tout ceci confirme les principes déjà formulés et que nous résumons comme suit :
La langue est un système dont toutes les parties peuvent et doivent être considérées dans leur solidarité synchronique.
Les altérations ne se faisant jamais sur le bloc du système, mais sur l'un ou l’autre de ses éléments, ne peuvent être étudiées qu'en dehors de celui-ci. Sans doute chaque altération a son contre-coup sur le système ; mais le fait initial a porté sur un point seulement ; il n'a aucune relation interne avec les conséquences qui peuvent en découler pour l’ensemble. Cette différence de nature entre termes successifs et termes coexistants, entre faits partiels et faits touchant le système, interdit de faire des uns et des autres la matière d'une seule science.
§ 4.
La différence des deux ordres illustrée par des comparaisons.
Pour montrer à la fois l'autonomie et l'interdépendance du synchronique et du diachronique, on peut comparer le premier à la projection d'un corps sur un plan. En effet toute projection dépend directement du corps projeté, et pourtant elle en diffère, c’est une chose à part. Sans cela il n'y aurait pas toute une science des projections ; il suffirait de considérer les corps eux-mêmes. En linguistique,