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NÉCESSITÉ d'admettre QUE l'iNDO-EUR. DISTINGUAIT A HE O^. 115

ce point-là. 2** Merveilleuse répartition des richesses vocaliques obtenues par le scindement. Nul désordre au milieu de cette multiplication des a. Il se trouve que e est toujours avec o, et a toujours avec a. Un tel fait est inimaginable. 3*^ Les trois espèces d'à supposées pour la langue mère (a o à) n'étaient pas, évidem- ment, sans une certaine relation entre elles : mais cette relation ne peut avoir rien de commun avec celle que nous leur trouvons en Europe, puisque dans la langue mère e et a, par hypothèse, étaient encore un seul phonème. Ainsi les langues européennes ne se seraient pas contentées de créer un ablaut qui leur est propre; elles en auraient encore aboli un plus ancien. Et pour organiser le nouvel ablaut, il leur fallait disloquer les éléments du précédent, bouleverser les fonctions respectives des différents phonèmes. Nous croyons que cet échafaudage fantastique a la valeur d'une dé- monstration par absurde. La quantité inconnue désignée par x ne peut pas avoir été une et homogène.

Cette possibilité écartée, il n'y a plus qu'une solution plau- sible au problème: transporter tel quel dans la langue mère le schéma obtenu pour l'européen, sauf, bien entendu, ce qui est de la détermination exacte du son que devaient avoir les diflférents phonèmes.

��Quand on considère le procès de réduction des a deux fois répété dans le domaine indo-européen : dans le celto-slavo-germa- nique à un moindre degré, puis sur une plus grande échelle^ dans les langues ariennes, et cela en tenant compte de la position géo- graphique des peuples, il semble à première vue très naturel de croire que c'est là un seul grand mouvement qui aurait couru de l'ouest à l'est, atteignant dans les langues orientales sa plus grande intensité. Cette supposition serait erronée: les deux événements, il est aisé de le reconnaître, ne sauraient être liés historiquement. Le vocalisme des a, tel que l'offre le slavo-germanique, ne peut en aucune façon former le substratum des phénomènes ariens. L'arien distingue ag de a et confond a avec a^. L'Europe septentrionale confond ag avec a.

Il est un cas sans doute où l'aa arien est confondu lui aussi avec A (et %), c'est lorsqu'il se trouve dans la syllabe fermée. Mais, à l'époque où, dans d'autres conditions, se produisit l'allongement

��1. Sur une plus grande échelle, en ce sens qu'outre la confusion de a^ et ^, il y a eu aussi plus tard coloration de a^ en a. Voyez la suite.

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