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196 LA FLEXION FAIBLE RÈGNE SEULE AU PLURIEL ET AU DUEL.

de la désinence et point par l'accentuation. Etudions cependant cette accentuation. Ni en sanskrit ni en grec la désinence n'a le ton {pitfhUs, irarpàai etc.). M. Osthoff [Beitr. de P. et B. III 49) rétablit *pitrbhis, *TraTpaffî. Dès qu'on admet la flexion faible, cette correction est inutile^.

Mais il y a les mots-racines. Ici l'accent frappe les désinences -bhis, -bhyas, -swa: gr. iroffCTi, skr. adbhis, adbhyds, apsû. Nous de- vons croire que c'est là une imitation, proethnique mais hystérogène, de l'accentuation du singulier. En tous cas, lors même que cette supposition serait fausse, et que les désinences en question auraient eu partout le ton, comme le pense M. Osthoff, le fait que l'affai- blissement n'est dû qu'au contact de la consonne désinentielle ne nous en semblerait pas moins certain.

Cependant, en présence de l'accord des formes fortes {mrdâve, pitàras) avec les formes comme pitfbhis d'une part et l'accusatif pluriel de tous les thèmes de l'autre (v. ci-dessus), il nous semble qu'on a le droit de poser la non attraction du ton vers les désinences comme un des caractères distinctifs de la flexion faible.

I^e génitif plur. skr. uksndm (got. auhsne), zd. brâ^râm (gr. iraipôiv) etc. se place à côté de yukty-àm, mrdw-dm (zd. vanhvâm), v. p. 194.

Duel. Le nom.-acc. pitârau, uksdnau, sdkhâyau, bâhâvâ, est con- forme aux règles de la déclinaison faible, plus conforme même que la forme étrange yuktï et mrdû des thèmes qui sont si fidèles à cette flexion (p. 194). Au gén.-loc. yukti et mrdû font en sanskrit yuktyôs, mrdvôs. Il faudrait *yuktàyos, *mrdâvos, et pareillement pitàros etc. Or cette dernière forme précisément, d'après les recherches de Grass- mann, est exigée par le mètre dans les 20 passages du Rig-Véda où le texte porte pitrôs^; mâtaros apparaît dans trois passages sur quatre. Nous ignorons s'il y a un grand nombre de ces analogues. Ceux-là nous semblent déjà très significatifs. En zend on a le gén. duel çpentoxratavâo. En slave kostiju, synovu, sans être de nature à confirmer grandement notre conjecture, ne lui donnent pas de dé- menti. Les formes comme yuktyôs, pitrôs, se seront formées en ana- logie avec les génitifs du pluriel.

��1. En faveur de l'accentuation pitfbhis, on peut remarquer qu'elle est de règle pour les monosyllabes composés de racine -+- suffixe, comme n'-bhis, dyà- bhis, snû-bhis, stf-bhis. Si -bhis avait originairement possédé toujours le ton, on attendrait certes ^vibhis, dyubhis etc.».

2. Notons bien que l'instr. sg. pitrâ, le dat. pitri, ne donnent lieu à au- cune remarque semblable. — Pitaros avait à coup sûr le ton sur la 2* syllabe.

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