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nasales sonantes des désinences.

la nasale est restée, grâce à l’accent, absolument comme dans lihánti[1].

La désinence -ntu de l’impératif passe par les mêmes péripéties que -nti.

La désinence -nt de l’imparfait apparaît, après les thèmes consonantiques, sous la forme -an pour -ant. Cette désinence recevant l’accent – ex. vr-án de var –, elle n’a rien que de régulier.

La désinence du moyen -ntai devient invariablement -ate en sanskrit, lorsqu’elle s’ajoute à un thème consonantique. C’est que, primitivement, la tonique ne frappait jamais la syllabe formée par la nasale, ce dont témoignent encore les formes védiques telles que rihaté, ańǵaté. Brugmann, Stud. IX 294.

Au sujet de l’imparfait liháta, l’accentuation indo-européenne righn̥tá ne peut faire l’objet d’aucun doute, dès l’instant où l’on admet righn̥tái (rihaté). Quant à l’explication de la forme indienne, on peut faire deux hypothèses : ou bien le ton s’est déplacé dans une période relativement récente, comme pour le présent (véd. rihaté, class. liháte). Ou bien ce déplacement de l’accent remonte à une époque plus reculée (bien que déjà exclusivement arienne) où la nasale sonante existait encore, et c’est ce que suggère le védique kránta (Delbrück, A. Verb. 74) comparé à ákrata. On dirait, à voir ces deux formes, que la désinence -ata n’appartient en réalité qu’aux formes pourvues de l’augment[2] et que dans toutes les autres la nasale sonante accentuée a dû devenir an, d’où la désinence -anta. Plus tard -ata aurait gagné du terrain, et kránta seul aurait subsisté comme dernier témoin du dualisme perdu. Cette seconde hypothèse serait superflue, si kránta était une formation d’analogie, comme on n’en peut guère douter pour les formes que cite Bopp (K. Gramm. d. Skr. Spr., § 279) : prā́yuńǵanta etc. Cf. plus haut p. 11.

Participe présent en -nt. Le participe présent d’une racine comme vaç « vouloir » (2e classe) fait au nom. pl. uçántas, au gén. sg. uçatás. Dans les deux formes il y a nasale sonante ; seulement cette sonante se traduit, suivant l’accent, par an ou par a. Au contraire dans le couple tudántas, tudatás, de tud (6e classe), la se-

  1. S’il y a un argument à tirer de l’imparfait apunata, il est en faveur de notre analyse.
  2. Il est certain que l’accentuation de ces formes a été presque partout sans influence sur le vocalisme, et qu’il faut toujours partir de la forme sans augment. Mais cela n’est pas vrai nécessairement au delà de la période proethnique.