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Page:Sauvé - Le Folk-Lore des Hautes-Vosges, 1889.djvu/78

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le mois de mars

Grand. Autrefois, on disait en forme de proverbe : « Saint Geurgôle näe eune fusäe », ce qui signifiait, à une époque où les femmes ne connaissaient d’autre instrument pour filer que le fuseau : « Quand la Saint-Grégoire est venue, le travail du soir de chaque fileuse d’une fusée diminue. »

Il y a quelque soixante ans, un passe-temps très-apprécié de la jeunesse avait lieu la veille du ce jour, dans la même région. On l’appelait la noyade des lampes, et voici en quoi il consistait : — À la fin de la dernière veillée de la saison, l’usage voulait que toute fontaine fût surmontée d’une lampe. Les jeunes gens, garçons et filles, que des besoins communs rassemblaient, deux ou trois fois le jour, autour d’une même fontaine, n’avaient garde d’oublier de s’entendre, en temps utile, à l’effet de pourvoir à son illumination. La chose était facile et peu coûteuse d’ailleurs : on prenait un navet, le plus gros possible, on lui donnait la forme d’une tête de mort, et, avec un peu d’huile et une mèche, on en faisait une lampe irréprochable. Celle-ci, tout passant qui n’avait pas le cœur aux talons devait faire en sorte de l’enlever ou de l’éteindre. Pour y réussir, par exemple, il ne fallait pas redouter une aspersion d’eau glacée. Bien que nulle lampe, en effet, ne parût surveillée, chacune d’elles avait pour la défendre un intrépide gardien dissimulé