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l’âme en bourgeon


Tu devras tout apprendre, et tes yeux étonnés,
Pleins d’ivresse d’abord de voir et d’être nés
Comme des fleurs de mars aux doigts de la lumière,
Tes yeux s’émerveillant de la douceur première,
Riront à l’infini.

Tu croiras que l’oiseau qui pille les cerises
Poursuit pour ton bonheur le pas glissant des brises
Dans le ciel glacé d’or où l’astre pend son nid,
Tu croiras que la lune est un galet poli
Pour servir d’amusette.

Mais de l’ordre apparent bientôt tu comprendras
Le triste agencement, les vernis, les plâtras.
En son lustre la fleur te paraîtra moins nette,
Tu connaîtras que l’être est pris par la tempête
Comme un grain dans le vent.