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pleine lune ou croissant


SOIR RÉTROSPECTIF


Je me souviens : l’instant étreint l’âme des plantes,
Des flottes d’or s’en vont sur le lac de l’éther,
Des cloches de moutons versent leurs eaux dolentes,
La corne du bélier lunaire perce l’air.
Je suis seule. Les monts se colorent d’extase,
Les fleurs et les maisons se ferment. C’est le soir.
Un ver luisant béat qui gîte dans un vase
S’argente comme un pleur au velours d’un œil noir ;
Le fenouil écrasé jette une odeur farouche,
Comme la sauterelle au contact de nos doigts