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Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/109

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effrayer Virginie. La mer et la solitude, c’était son lot : elle ne comptait dans sa famille que des marins, des pilotes et des gardiens de phare.

Kergrésan, lui, était un terrien, mais il avait servi dans la flotte. Et, venu à Ouessant, il s’était épris d’amour pour Virginie et l’avait épousée avec l’idée de la ramener un jour sur le continent. Travailleur, il pensait pouvoir mieux employer ses bras sur « la grande terre » qu’à Ouessant. Or, Virginie répugnait à quitter le pays. Elle n’aurait su vivre sans la mer. Alors, ayant appris que la ferme de Trielen était à louer, les jeunes époux partirent pleins d’espoir vers l’îlot, dans la barque d’un pilote.

Virginie était une grande rousse, tout os et muscles, bâtie comme un gabier dont elle avait un peu la démarche chaloupante. Tout de même, à cause de sa belle santé et de ses yeux verts, elle ne manquait pas d’agrément, paraît-il. Courageusement, ils se mirent à la tâche, arrachant, traînant, empilant les goémons dont ils fécondèrent leur sol ingrat ; puis, la saison venue, ils entassèrent leur récolte humide, pour la vente.

Aux instants de répit, ils montaient dans leur canot et prenaient du poisson.