Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/116

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Quand vint la troisième nuit, Yannic et Françoise furent, à leur tour, prises de coliques. Ce fut alors que Kergrésan mourut, sans une plainte : Virginie s’en aperçut seulement après que le petit Yves eût agonisé dans ses bras.

Au lendemain, avec le jour, le cadavre de son mari l’épouvanta. À travers la peau noirâtre et desséchée apparaissaient des saillies cartilagineuses ; ses lèvres violettes s’étaient encore amincies. Elles découvraient maintenant les dents dans un abominable rictus. Pourtant elle voulut entreprendre la toilette du mort. Le temps orageux et lourd s’était accentué, le cadavre commençait à sentir.

La vigueur ne lui manquait pas d’ordinaire. Mais trois nuits de veille et la douleur l’avaient épuisée et, sur la couche voisine, un autre petit défunt attendait ses soins. Lorsqu’elle porta la main sur son mari, une sueur froide l’envahit toute, avec une terreur inexplicable, seulement au toucher de cette peau visqueuse qui n’avait plus rien de l’homme... Quelque chose de la peau froide et satinée d’un batracien. Alors, par crainte de devenir folle, elle n’osa poursuivre sa tâche.

Yannic et Françoise se tordaient de douleur. C’était le même mal foudroyant qui avait déjà