Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/189

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- Agréable fermière, dit-il, comme tu ferais le bonheur d’un homme !

« Je n’ai jamais compris pourquoi tu n’étais pas entourée de bébés roses, pourquoi un légitime époux n’était pas à tes côtés, remerciant le ciel d’avoir pu assurer l’embargo d’une aussi charmante compagne.

« Voyons, pourquoi ne te maries—tu pas ?

Or elle lui répondit avec aigreur :

— Est-ce que je ne me suffis pas à moi-même ?

— Mais tu as vingt ans !

— La belle affaire, si j’épouse un matelot ! M’embarrasser d’un mari que je verrai à peu près tous les quatre ou cinq ans, comme c’est le cas de Jeanne Le Gwen, de Barbe Le Meur, de Rose Iliou et de tant d’autres !...

— Alors prends un étranger !

— Travailler pour un homme, non pas ! Vous n’avez rien à faire ici, pas de pêche, pas de commerce, et nous, femmes, l’agriculture est notre lot. — Et puis, réfléchit-elle, se marier est devenu bien difficile... elle insista lentement, appuyant sur les mots, presque impossible pour celle qui a connu quelqu’un d’autre qu’un Ouessantin. Les gens d’ici sont trop grossiers. Bon pour celles qui n’ont jamais rien appris de l’amour...