quoi, même l’irraisonnable, jusqu’à la fin de ses jours.
— Dis-le à ta mère, dis-le-moi, que tu veux être marin, et je te tuerai, tu m’entends, race de Kéméan, car tu es bien un Kéméan, fit-elle sans orgueil, et le vrai fils de ton père…
Il était tout le portrait de son père, en effet. Un gros front luisant, bombé, et de petits yeux gris ; il avait les épaules carrées, il était gras, solide, imperturbablement réjoui, mais d’une satisfaction intime et mystérieuse, pareil à une plante qui pousse bien, sans en rien dire. Et il regardait le sol, déjà concis et méditatif, la bouche close. Même aux jours de sa première enfance, il avait été aussi peu bruyant, comme pour se préparer aux grands silences et à la monotonie de la vie des mers. Ainsi que beaucoup de gamins du littoral, il avait l’air d’un petit homme ou d’un matelot, dans ses habits qui reproduisaient ceux des grands. Car on ne se met pas en frais, pour l’habillement de la jeunesse à Ouessant.
Salomé s’était assise. Puis, attirant son fils sur ses genoux, elle le regarda, pensive. Ah ! oui, comme il lui ressemblait, à cet homme dont elle se sentait si détachée, maintenant, avec amertume ! Et elle se mit à embrasser