Page:Say - Œuvres diverses.djvu/164

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société, des personnes dont l’ensemble compose la société[1] ; lorsqu’on dit Économie industrielle, on entend la connaissance des lois qui président aux richesses pour l’usage des personnes qui se consacrent aux professions industrielles[2]. Mais vous voyez que dans tous les cas il s’agit des lois qu’observent les richesses dans leur croissance et dans leur décroissance ; or, comment la connaissance de ces lois pourrait-elle nous être indifférente, ou plutôt comment ne nous inspirerait-elle pas un vif intérêt, puisque c’est dans leurs richesses, petites ou grandes, que les hommes trouvent les moyens d’exister, de jouir et de se multiplier ?

Telle est l’étude qui sera l’objet de ce cours. Nous l’appliquerons aux arts industriels ; c’est-à-dire que nous découvrirons ensemble l’usage que l’on peut faire des connaissances économiques lorsqu’on cultive les arts ; et ce sera un intérêt de plus ajouté à celui que nous venons devoir que les connaissances économiques, en elles-mêmes, doivent nous inspirer. Si quelques personnes ont cru, et même croient encore, que ce genre de connaissances manque de bases solides, c’est uniquement parce qu’elles sont préoccupées des systèmes hypothétiques auxquels on s’est livré dans le courant du siècle dernier, et qu’elles sont demeurées étrangères aux progrès qu’a faits en ce genre l’esprit humain, du moment qu’il a suivi la méthode qui a si merveilleusement hâté le développement des autres sciences.

Cette méthode consiste à ne prendre que les faits pour fondement de toutes nos connaissances, et à n’en tirer que des conséquences rigoureuses. Mais comme les rêveurs de systèmes prétendent, eux aussi, s’appuyer sur les faits, et raisonner fort juste, il ne sera pas inutile que

  1. Un autre motif encore justifie le nom d’Économie politique donné à cette science. Non-seulement ce sont les richesses de la société dont elle s’occupe ; mais c’est d’après l’étude qu’elle fait de la société qu’elle est en état d’assigner les causes qui font croître et décroître les richesses de l’homme. Les motifs qui déterminent l’offre et la demande des produits, des services productifs, sont des phénomènes moraux et sociaux. C’est aussi ce qui met cette science au nombre des sciences morales et politiques. (Note de l’Auteur.)
  2. En réalité, cette distinction entre l’économie politique et l’économie industrielle manque de fondement. Mais il est facile d’apercevoir que le professeur cédait aux exigences d’un pouvoir qui n’avait pas voulu lui permettre d’appeler, de son nom véritable, l’enseignement qu’il lui confiait. Du reste, le terme même consacré par l’usage, n’était pas d’une parfaite exactitude ; et c’est avec raison, il nous semble, que J.-B. Say a écrit plus tard (Cours compl. tome Ier p. 1) l’opinion qu’il serait opportun de remplacer les mots d’économie politique par ceux d’économie sociale. (E. D.)