Page:Say - Œuvres diverses.djvu/20

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détaillé sur la situation industrielle du pays qu’il venait de visiter ; et, en même temps, voulant faire connaître au public quelques-unes des informations qu’il avait recueillies, il imprima un écrit de quelques feuilles intitulé De l’Angleterre et des Anglais[1], qui eut deux éditions. Il montrait comment la prospérité du commerce et de l’industrie avait été exploitée pour soutenir la guerre, et dans quelle situation financière fâcheuse le pays avait été amené par les dépenses excessives de son Gouvernement. La suspension des paiements de la Banque, la dépréciation du papier-monnaie, l’énormité de la dette, les conséquences probables de la souveraineté, des Indes, la question des céréales, sont autant de points traités avec sagacité, et l’on trouve dans cet écrit plus d’un avertissement devenu prophétique.

L’Économie politique a toujours effrayé le gouvernement en France, et a été, par cela même, rejetée dans l’opposition. Aussi ce fut, en 1815, un vif attrait pour le public qu’un cours de cette science ouvert à l’Athénée par J.-B. Say ; on s’y portait en foule, et le succès fut complet. Le professeur, encouragé par l’accueil qui lui était fait, redoubla d’efforts pour propager des doctrines qu’il regardait comme si importantes pour l’avenir des peuples. Les leçons d’un amphithéâtre restreint, la propagande plus ou moins lente des ouvrages de longue haleine, étaient insuffisantes à ses yeux ; il fallait encore rendre la science accessible à toutes les fortunes, et il lui parut utile de résumer en un petit nombre de pages les principes généraux et leurs applications les plus immédiates. La forme familière du dialogue permet de présenter avec rapidité les difficultés qu’on croit essentiel de résoudre, tout en négligeant les points moins graves qu’on ne pourrait traiter sans de longs développements. Le Catéchisme d’Économie politique[2], publié pour la première fois en 1817, a eu de nombreuses éditions et a été traduit, ainsi que le Traité, dans presque toutes les langues de l’Europe.

L’Économie politique n’absorbait pas cependant tous les instants de J.-B. Say ; d’ailleurs pour en bien reconnaître le domaine et en tracer les limites, il lui avait fallu l’aire une étude complète de l’ensemble des sciences morales et politiques. Il a laissé de nombreux fragments qui montrent que, si le temps ne lui eût manqué, il se proposait d’écrire un Traité de morale, et un autre de politique pratique. Les observations qu’il avait jugé utile de mettre par écrit étaient classées avec méthode ; celles qui ne seraient point entrées dans les livres purement scientifiques, auraient trouvé place dans des écrits d’une forme plus familière. La Correspondance d’un Docteur et ses propres Mémoires lui paraissaient fournir des cadres convenables. Mais pour répandre ainsi des vérités utiles, il ne fallait négliger aucune des parties de l’art de bien dire, et ce qu’il avait préparé pour des Lettres à une dame sur le talent d’écrire, fait regretter que cet ouvrage n’ait pas été terminé. Pré-

  1. Reproduit page 205 de ce volume.
  2. Page 1 de ce volume.