Page:Say - Œuvres diverses.djvu/231

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

indique ce qu’ils peuvent attendre de certaines ressources dont le produit, quoique éventuel, est cependant regardé comme certain, telles que les postes, les loteries, les droits perçus par la régie de l’enregistrement.

Quant aux entreprises que des circonstances nouvelles rendent nécessaires après qu’on a déterminé le montant des dépenses annuelles, les moyens d’y pourvoir se trouvent, soit dans un fonds réservé pour les dépenses imprévues, soit dans des ressources extraordinaires pour lesquelles on obtient toujours le concours de l’autorité législative. L’Angleterre n’a éprouvé aucun inconvénient de l’obligation où est le ministre de mettre sous les yeux de la chambre des communes les besoins présumés de l’année suivante, quelquefois trois mois avant le commencement de l’année. Il est vrai que, dans les circonstances critiques, le fonds réservé pour les dépenses imprévues est bien plus considérable que dans les temps ordinaires : il est communément de 200,000 livres st. et pour l’année 1799 il fut porté à la somme énorme de 3 millions sterling.

Ce serait un grand malheur si quelques personnes regardaient encore les principes que je viens d’énoncer, comme des lieux communs de finance qui ne sont bons qu’à être violés, ou comme des entraves propres à gêner la marche du gouvernement. Suger, le cardinal d’Amboise, Sully, Colbert ne pensaient pas ainsi. Ils s’imposaient les lois sévères que ne leur prescrivait pas la forme du gouvernement d’alors, et c’est précisément pour cela qu’ils trouvaient les ressources les plus sûres au moment du besoin et qu’ils ont fourni à leurs princes les moyens de faire de grandes choses. L’abbé de Saint-Denis subvint aux frais de la seconde croisade (entreprise que je suis loin d’approuver) ; d’Amboise prépara la conquête du Milanais par Louis XII ; Sully l’abaissement de la maison d’Autriche ; Colbert les plus grands succès de Louis XIV : tandis que le défaut de plan sous la régence d’Anne d’Autriche, dans la dernière moitié du règne de Louis XIV, et même sous nos yeux, dans les derniers temps de la monarchie, ont produit les désordres de la Fronde, les embarras honteux de la Régence, la Révolution enfin, exemple terrible, fécond en grands résultats, mais en malheurs multipliés.

Ce ne sont point là des théories, mais des faits graves et bien constatés.

Tribuns, il était nécessaire d’établir ces principes pour qu’on ne se