Page:Say - Œuvres diverses.djvu/317

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tration ; mais ce n’est pas alors la pratique de la science sociale ; c’est la pratique du commerce, de etc., où l’on se sert des connaissances qu’on a acquises sur la nature de l’homme et des choses.

Parallèle de l’économie politique avec la politique[1]. —Je ne conçois pas comment M. Storch a pu dire que l’économie politique n’est qu’une très-petite partie de la science de l’État. L’économie politique, qu’on aurait peut-être mieux fait de nommer l’économie sociale, est la connaissance des organes et des aliments du corps social ; elle enseigne par quel mécanisme il subsiste, elle est à la société ce que la physiologie est au corps humain. La politique n’en est que l’hygiène. Sa perfection est d’être simple, de marcher avec des rouages peu compliqués. Le meilleur gouvernement est celui que l’on voit et que l’on sent le moins.

Les sciences fondées sur les faits physiques ne sont point toutes des sciences exactes. Il n’y a dans la physique expérimentale qu’un bien petit nombre de résultats que l’on puisse établir d’avance par le calcul. Les calculs de la mécanique analytique ne sont jamais confirmés par les résultats de la mécanique expérimentale, parce qu’on n’a jamais pu apprécier rigoureusement les frottements, l’élasticité des corps, la résistance de l’air suivant la nature des corps qui le frappent non plus qu’une multitude d’autres circonstances dont l’influence sur les résultats est fort grande. C’est exactement pour la même raison que l’économie politique n’est point une science exacte, et que ceux qui ont voulu y appliquer les formules algébriques n’ont rien produit d’utile et de vrai. Mais comme science expérimentale elle est éminemment utile ; car si elle ne nous enseigne pas jusqu’à quel point exact une cause agit, au moins nous indique-t-elle dans quel sens elle agit, et si cette cause nous éloigne ou nous approche du but désiré : le bonheur de l’espèce. On ne peut pas dire qu’elle n’est pas soumise au calcul, car l’appréciation et le choix des moyens sont des calculs ; mais les bases de ces calculs, au lieu d’être des données arbitraires comme dans les mathématiques, sont des faits réels. On est d’autant plus savant en économie politique que l’on connaît mieux les faits qui doivent entrer dans les calculs, et que l’on apprécie mieux l’étendue de leur influence.

  1. Storch, t. I, p. 15.