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Consommation[1]. — Consommer une chose, suivant M. Storch, veut dire l’employer à ses besoins. Mais pour qu’il y ait consommation, il faut de plus qu’il y ait une destruction de valeur et que cette valeur ait été donnée par l’industrie. On ne consomme pas l’eau d’une rivière, bien qu’on l’emploie, parce qu’elle n’avait aucune valeur. On ne consomme pas un champ, bien qu’il ait une valeur, parce que ce n’est pas l’industrie qui la lui a donnée ; mais on peut consommer les clôtures, les bâtiments ajoutés à ce champ, parce que ce sont des produits de l’industrie ; qu’ils ont une valeur et que la consommation qu’on en fait détruit cette valeur. Ce n’est point parce qu’une chose est terminée, finie, comme il est dit plus bas, qu’elle est consommée : c’est parce que sa valeur n’existe plus. Il n’y a aucun rapport entre la consommation d’un mariage et les consommations de l’économie politique, si ce n’est, peut-être, les satisfactions qu’on y goûte.

Idée générale du prix des choses[2]. — L’exposition donnée à cette occasion par M. Storch, est en général vraie, mais n’a peut-être pas dans l’expression toute la précision désirable.

Il est impossible de parler du rapport entre la quantité que l’on offre et la quantité que l’on demande d’une certaine marchandise, en faisant abstraction de son prix, parce que c’est à tel prix et non à tel autre que l’on peut demander d’un côté et offrir de l’autre telle ou telle quantité.

En 1813, lorsque la difficulté des communications, les risques de la contrebande, l’énormité des droits, avaient porté les sucres blancs en France au prix de cinq francs la livre, la France se trouva dans l’impossibilité d’en consommer et, par conséquent, d’en demander plus de quatorze millions de livres par an (voyez le rapport fait à cette époque par le Ministre de l’intérieur). Aujourd’hui (1822) que le même sucre vaut un franc, il convient à la France d’en consommer cent millions de livres environ. Dans les deux cas, les quantités fournies à la France étaient égales à la demande ; mais il est évident que ces quantités étaient dépendantes des prix.

Sur ce sujet assez délicat, il n’est pas impossible d’accorder Adam Smith, qui pense que les prix sont, pour chaque marchandise, le résultat du rapport entre l’offre et la demande, et M. David Ricardo qui soutient que l’offre et la demande n’y influent en rien, et que les prix

  1. Storch, t. I, p. 50.
  2. Ibid. p. 80.