Page:Say - Œuvres diverses.djvu/319

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des choses ne sont réglés que par les frais de production, par cela même que M. Storch appelle le prix nécessaire.

Les frais de production déterminent, il est vrai, le prix auquel on peut fournir une certaine quantité d’une certaine denrée ; mais ces frais eux-mêmes varient selon la demande. En effet, de quoi se composent les frais de production ? Des profits des différents producteurs, du salaire des travailleurs notamment. Quand la demande d’un produit augmente, le salaire des travaux propres à le créer augmente ; et comme ce salaire compose en partie les frais de cette production, il est également vrai que le prix est monté par suite de la demande, et que le prix est toujours égal aux frais de production.

Ainsi, en supposant que la population et la richesse de la France vinssent à s’accroître, la France pourrait porter la consommation du sucre qu’elle fait de cent à cent vingt millions de livres. La quantité offerte resterait pour un moment inférieure à la quantité demandée ; le prix monterait conséquemment ; et les producteurs de sucre pourraient dès lors en faire venir de plus loin et en tirer de quelques endroits où sa culture est plus dispendieuse ; les salaires et les profits des anciens producteurs seraient plus forts, une demande plus grande aurait porté le prix de cette denrée d’un franc à un franc vingt centimes peut-être, et ce prix ne serait encore que le remboursement des frais de production.

Dans la supposition contraire, si la culture d’une canne plus abondante en sucre, celle de Taïti, par exemple, se répandait partout où l’on peut cultiver cette plante ; on obtiendrait peut-être, sans faire plus d’avances, un quart de plus de sucre ; l’offre du sucre augmenterait ; son prix baisserait à quatre-vingts centimes ; et ce prix, causé par l’effet de l’offre, serait encore l’expression des frais de production.

Les prix ne sont pas seulement déterminés par le rapport qui existe entre l’offre et la demande : ils sont l’expression même de ce rapport. Mais la preuve de cette proposition exigerait des développements qu’il m’est impossible de donner ici.

Quant au monopole, il ne fait que varier les données ; mais il ne change rien à la théorie. Regardez la quantité d’une marchandise que le monopoleur met en vente, comme la quantité que l’on peut obtenir sur la production, et les profits qu’il fait, comme étant des frais de production indispensables, et vous aurez, aussi bien que dans les exemples précédents, un prix qui sera tout à la fois le résultat du