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. Unité du budget. Spécialisation des recettes assignations, affectations, budget Mais il ne suffit pas que le budget comprenne la totalité des recettes et des dépenses il faut encore qu’il les réunisse dans un tableau unique. Il s’en faut de beaucoup que ce second principe ait été aussi fidèlement suivi que le premier.

L’Ancien Régime avait l’habitude de spécialiser les recettes,’ c’est-à-dire de consacrer des revenus déterminés à l’acquittement de certaines dépenses ; un payement était assigné sur les tailles, sur les gabelles, aides et entrées, sur les cinq grosses fermes, etc. Encore de nos jours, dans les pays d’Orient, le produit d’un impôt ou d’un revenu public est souvent affecté en gage aux créanciers de l’État. Et même en France, il ne faut pas remonter bien haut dans notre histoire budgétaire pour trouver des exemples de ces affectations et de ces assignations qui tendent, en somme, à constituer autant de budgets distincts et indépendants. En 1816, le comte Corvetto, afin de doter la Caisse d’amortissement qu’il venait de reconstituer, lui attribuait le revenu des postes. Deux ans plus tard, la même Caisse était chargée de payer les arrérages de la dette consolidée et elle recevait pour ce service, avec les postes, les produits nets de l’enregistrement, du timbre, des domaines et de la loterie, tandis que l’amortissement était doté au moyen du produit des forêts. Ce budget spécial a subsisté jusqu’en 1830. En 1866, sous le ministère de M. Fould, le budget de l’amortissement a été rétabli et a duré jusqu’en 1870. Sa dotation permanente se composait alors des forêts de l’État et de la nue propriété des chemins de fer concédés ; sa dotation annuelle, du produit des forêts, du produit de l’impôt sur les transports en chemins de fer, du partage des bénéfices entre l’État et les compagnies, des bénéfices de la Caisse des dépôts et consignations, des arrérages des rentes rachetées, enfin d’une partie des excédents de recettes du budget ordinaire. En 1871, les forêts de la liste civile servirent de gage à une avance consentie par la Banque de France. Déjà, quelques mois auparavant, M. Clément Laurier avait eu l’idée, à l’occasion d’une autre avance, de donner en garantie àla Banque le revenu des postes. Mais M. Magne avait empêché laréalisation de ce projet, en rappelant tous les inconvénients attachés à la multiplicité des budgets et en représentant que la constitution d’un gage est toujours le signe de l’amortissement. Budget sur ressources spéciales. Services spéciaux du Trésor. Budgets annexes rattachés pour ordre. Distinction entre l’unité budgétaire et la centralisation.

d’un crédit mal assuré, qu’un débiteur riche et honnête emprunte sur le seul renom de sa solvabilité et de sa bonne foi. Sage conseil qui fait également honneur à celui qui l’a donné et à ceux qui l’ont suivi dans l’état critique où se trouvait alors la France !

Le budget sur ressources spéciales, créé en 1862 et conservé dans nos lois annuelles de finances, semblerait également, si on ne s’attachait qu’à son titre, continuer la tradition des spécialisations de recettes. Ce budget est mal dénommé. Il est exclusivement consacré à certaines opérations que l’État accomplit, en quelque sorte, à titre de trésorier et pour le compte d’autrui. Les dépenses y sont subordonnées aux recettes et conservent toujours avec elles une complète égalité. Il comprend principalement les recettes et dépenses des départements qui, bien que votées par les conseils généraux, restent, sans qu’on sache trop pour quelle raison, incorporées dans le budget général. On y porte également, en recette et en dépense, la partie des contributions directes perçue-pour le compte des communes. On y fait entrer enfin les fonds perçus au moyen de centimes additionnels à ces mêmes contributions, pour des secours spéciaux à l’agriculture, pour les non-valeurs résultant des remises ou modérations, pour les réimpositions nécessitées par les décharges ou réductions, pour le service de l’assistance hospitalière en Algérie, etc. « Ce sontlà, disait l’exposé des motifs du budget de 1863, des recettes et des dépenses qui ne figurent véritablement que pour ordre au budget. Il faut les en séparer sans les soustraire au contrôle législatif, si on veut se faire une idée exacte et précise des ressources réelles de l’État ». M. Fould, à qui est due la création du budget sur ressources spéciales, paraissait y voir surtout un moyen de dissimuler l’accroissement constant des budgets. Aussi M. Thiers s’est-il élevé au début contre cette innovation qu’il jugeait contraire au principe de l’unité. Le budget spécial n’en a pas moins été maintenu parce que son institution répondait à une idée logique et vraie. Un nouveau budget spéciala fait son apparition dans nos lois de finances depuis 1887. Il comprend, sous le nom de services spéciaux du Trésor, les annuités dues aux Compagnies de chemins de fer pour garantie d’intérêts et affecte à ce service des obligations à court terme. La création de ce budget a sa raison d’être dans la nature particulière des opérations qui y sont inscrites. On sait, en effet, que les sommes payées à titre de garantie constituent, non des dépenses définitives de l’État, mais des avances remboursables par les Compagnies. Toutefois, pour que