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auprès de lui en qualité d’administrateur du Trésor et lui confia la surveillance de la caisse de service.

Le baron Louis fut chargé par la suite de diverses missions financières. En -1810, après la réunion à l’empire de la Hollande, il fut chargé de liquider la dette publique de ce pays et de régler l’arriéré qui restait à solder ; plus tard, il fut envoyé à Dùsseldorf et à Munster pour régler les engagements pris par la France relativement aux dettes contractées par les duchés de Berg et de Clèves et par l’évêché de Munster.

Le 6 avril 1814, le gouvernement provisoire de la Restauration appelait le baron Louis au ministère des finances. Bepuis Tinvasion, l’impôt n’était plus perçu ; la caisse centrale du Trésor ne renfermait que 5 millions, celles des départements étaient vides. Après avoir émis avec succès dix millions d’obligations du Trésor remboursables àtroismois et portant un intérêt de 8 p. 100, et avoir fait rentrer dans les caisses publiques, malgré les réclamations du comte d’Artois, les 10 millions de la liste civile qui avaient été expédiés à Blois à la suite de l’impératrice, et saisis à Orléans, le baron Louis fit maintenir les droits réunis, dont d’imprudentes promesses avaient fait espérer la suppression, menaçant de quitter le pouvoir si cet impôt, nécessaire pour acquitter tous les engagements du Trésor, était supprimé. Après avoir provoqué l’ordonnance provisoire du 23 août 1814, qui abaissait divers droits en faveur de l’industrie et du commerce français, le baron Louis fit rétablir les douanes désorganisées depuis l’invasion. Au commencement de juin, la perception des impôfs était reprise et la rente 5 p. 100 qui, au 1 er avril, était cotée 45 francs avait atteint le cours de 65 francs.

Maintenu au ministère par Louis XVIII, il n’accepta d’y rester qu’à la condition que l’arriéré, évalué par luià 759 millions, serait entièrement soldé et que la charte contiendrait la promesse d’acquitter tous les engagements de l’État.

En présentant, le 22 juillet, à la Chambre des députés le projet des budgets de 1814 et de 1815, il posa les vrais principes du régime parlementaire en matière de finances ; il affirma le droit qui appartient aux Chambres de voter les dépenses, et le principe de la responsabilité des ministres (V. Budget, §7). Quant à l’arriéré, le baron Louis s’opposa à ce qu’on le payât en rentes données au pair, alors qu’elles étaient à 75 francs, estimant que le Trésor ne payerait de la sorte que les trois quarts de ce qu’il devait, et qu’il se libérerait, pour le surplus, par une banqueroute ; aussi voulut-il que l’on créât, afin de les remettre en payement aux créanciers de l’arriéré, des obligations portant 8 p. J 00 d’intérêt, taux obtenu à ce moment par un placement d’argent en rentes. Parmi les gages affectés au payement de ces obligations, le baron Louis comprenait 300 000 hectares des bois de l’État. Dans une pensée politique, il voulut comprendre dans l’aliénation de ces bois d’anciennes propriétés du clergé. «Je pourrais me passer de cet argent-là, disait-il à Louis XVIII, mais ce dont je ne puis me passer, c’est la foi aux faits accomplis. Elle existera le jour où les ventes consommées sous d’autres gouvernements recevront la consécration de ventes pareilles faites au nom du roi. »

Partisan de la liberté des échanges, il était cependant d’avis de ne pas sacrifier l’impôt à la liberté du commerce et de protéger les industries qui peuvent lutter avantageusement contre la concurrence étrangère, tout en conciliant l’intérêt du consommateur et celui du producteur. Il estima que le retrait de toute protection, surtout après le blocus continental (voy. ce mot), menacerait de ruiner beaucoup d’industries qui n’étaient pas assez avancées pour supporter la liberté absolue des échanges, et pourrait faire des masses d’ouvriers qui se trouveraient ainsi sans travail, des perturbateurs et des ennemis du gouvernement. Telles sont les idées qui présidèrent à la rédaction des deux projets de lois sur les douanes que le baron Louis présenta à la Chambre : l’un élevait les droits perçus sur les fers étrangers, l’autre confirmait l’ordonnance du 23 avril 1814 en ce qui concernait les denrées coloniales, autorisait le transit de certaines marchandises, conservait certaines prohibitions et autorisait le gouvernement, selon les circonstances, à augmenter ou diminuer les tarifs, à étendre ou modifier les prohibitions, par ordonnances royales soumises à la sanction des Chambres à laplus prochaine session (loi du 17 décembre 1814). Le baron Louis dut lutter de nouveau pour le maintien des droits réunis, qu’il fit conserver avec certains adoucissements dans les tarifs et le mode du perception. Il estimait que des impôts même défectueux, mais anciens, accepté s etpayés sans répugnance, sont préférables à d’autres qui pourraient leur être substitués avec profit. « On ne marche jamais mieux qu’avec de vieux souliers, » disait-il à Louis XVIII. Le baron Louis prità cette époque diverses mesures tendant à améliorer la comptabilité ; c’est ainsi qu’il organisa la comptabilité générale des finances et supprima les obligations des receveurs généraux.