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phénomène inverse soit constaté. Il peut être pourvu, en effet, aux besoins de la circulation au moyen d’autres instruments d’ échange, tels que les billets de banque, les chèques et, en général, tous les effets négociables ou au porteur. L’organisation plus ou moins parfaite de la circulation fiduciaire de chaque pays a, dans la matière, une influence très marquée.

L’emploi industriel des métaux précieux, pour avoir une moindre importance que leur usage monétaire, représente des chiffres assez considérables. D’après les évaluations du D r Soetbeer 1 , il serait employé annuellement dans l’industrie 90 000 kilogrammes d’or et 515 000 kilogrammes d’argent. Les quantités transformées en monnaies, de 1851 à 1885, seraient, d’après le même statisticien, de 8144 000 kilogrammes pour l’or, soit 232685 kilogrammes par an et de 40 millions de kilogrammes pour l’argent, soit 1 142 857 kilogrammes par an a . À ce compte, 28 p. 100 des quantités d’or et 31 p. 100 des quantités d’argent annuellement employées sont absorbés par les usages industriels : 72 p. 100 pour l’or et 69 p. 100 pour l’argent vont dans les ateliers monétaires.

En ce qui concerne l’offre des métaux précieux, plusieurs particularités doivent être relevées. Elles tiennent aux propriétés spécifiques de ces deux métaux. Les objets d’or et d’argent sont presque indestructibles lorsque le métal qui les forme est à l’état d’alliage, ils s’usent du moins avec une grande lenteur ; la fusibilité et l’homogénéité des métaux précieux permettent de les façonner, de les convertir en lingots, de les transformer de nouveau en objets ouvrés, sans qu’ils perdent rien de leur valeur propre et moyennant le seul sacrifice de frais de fabrication relativement faibles.

A raison de ces circonstances, les conditions de l’offre des métaux précieux diffèrent profondément de celles qui sont constatées pour la plupart des autres marchandises. Celles-ci sont consommées dans des délais ordinairement assez courts : les quantités mises en vente sont, en général, de production récente. A la vérité, quand on veut apprécier exactement la situation de leur marché, il est nécessaire de tenir compte des excédents de la production antérieure sur la consommation, de ce qu’on appelle les stocks ou approvisionnements. Mais, le plus souvent, i. Matériaux pour faciliter l’intelligence et l’examen des rapporis économiques des métaux précieux et de la question monétaire, trad. Ruau et Ringeisen. Paris, Berger-Levrault, 1S89.

. Les frappes du Mexique et de l’Inde anglaise ne sont P»a comprises dans ces chiffres. les stocks sont inférieurs à la production annuelle. En outre, ils ne s’accroissent pas indéfiniment. Au bout d’un laps de temps dont la durée est variable, les marchandises approvisionnées sont consommées en totalité et remplacées au moyen de prélèvements sur les productions nouvelles. -C’est précisément le contraire qui arrive pour les métaux précieux. Le stock des valeurs existantes, notamment à l’époque actuelle, est de beaucoup supérieur aux valeurs annuellement produites, et il ne cesse de s’accroître, malgré les déperditions résultant du frai, des thésaurisations, etc. Plusieurs conséquences découlent de ces faits. En premier lieu, pour que les variations de la production annuelle modifient les conditions de l’offre au point d’affecter la valeur actuelle des métaux précieux, il faut qu’elles soient très considérables, comme il est arrivé pour l’or après 1850 et pour l’argent après 1873. En second lieu, le pouvoir d’achat des métaux précieux tend à diminuer lentement mais d’une façon constante, par suite de l’augmentation constante des approvisionnements de ces métaux.

La faculté qu’ont For et l’argent d’être à peu de frais transformés par la fonte agit également sur les conditions de l’offre. Les quantités offertes ne se composent pas seulement des monnaies frappées et des matières récemment extraites des mines. Qu’il se produise, sur l’or ou sur l’argent, une prime assez élevée pour compenser la perte des frais de fabrication antérieurement employés à leur transformation en bijoux, médailles, objets d’orfèvrerie et pour donner un bénéfice suffisant à leurs possesseurs, aussitôt un certain nombre de ces objets seront réduits en lingots. On peut dire, par conséquent, que le stock métallique susceptible d’être porté sur le marché, concurremment avec les quantités annuellement produites, se compose des métaux précieux existants, quelle que soit la forme sous laquelle ils ont été façonnés. On trouvera, dans l’examen des causes auxquelles sont attribuables les variations survenues depuis un demi-siècle dans la valeur des métaux précieux, la confirmation des principes qui viennent d’être posés. Mais il convient de constater tout d’abord que ces principes ne sont pas unanimement admis. On a soutenu que la valeur des métaux précieux ne dépendait nullement du rapport de l’offre et de la demande. On a dit que « la loi humaine est le facteur prépondérant dans le mouvement et etans la valeur des métaux précieux i » et, plus explicite- [1]

  1. . Dana Hortoa, la Monnaie et la Loi.