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NEBENIUS

de l’État augmentent, il faut recourir de plus en plus aux impôts indirects. Nebenius n’a pas été partisan du système coûteux du calastre de l’impôt foncier en France. Toutefois, il se distingue des économistes anglais, en ce qu’il ne partage pas leurs idées sur l’intervention de l’État, qu’il ne condamne pas.

L’ouvrage le plus remarquable de Nebenius, c’est son Traité du crédit public. Voici le titre exact de la première édition (1820) : Der offentliche Crédit dargestelit in der Geschichte und in den Folgen der Finanzoperationen der grossen europâischen Staaten seit Herstellung des allgemeinen Land und Seefriedens ihrer Massregeln zur Begrûndung oder Befestigung ôffentlicher CreditanstaUen, und der Begebenheîten derHandetewelt, deren Wirhung damUzusammen getroffen, publié avec la permission de la censure grand-ducale ; Carlsruhe, chez Marx.

Dans la première édition déjà, Nebenius s’efforce de distinguer l’influence du marché des capitaux, delà Bourse et du crédit de l’État sur le prix des fonds publics. Les données historiques et statistiques prédominent et relèguent les théories au second plan. La seconde édition (1829) qui devait avoir deux volumes, dont le deuxième aurait été l’exposé historique, est, par contre, théorique. Sur les dix chapitres de ce premier volume, les deuxième, troisième et quatrième sont consacrés au marché des capitaux et à la Bourse. Nebenius réagit contre un emploi brutal de la statistique et met en garde contre des conclusions précipitées, tirées de la simple comparaison du montant de la dette et de sa proportion par tête d’habitant, dans différents pays. Le crédit public repose sur d’autres éléments que ceux de la simple arithmétique : situation géographique, condition politique, caractère du gouvernement, force et intelligence de la nation. Beaucoup de vérités exposées par Nebenius se rencontrent dans les écrits de Smith, Say, Hamilton, mais il les a confirmées et illustrées d’exemples appropriés, notamment sur la destruction de capital résultant de l’emploi improductif d’un emprunt, sur ce que les emprunts sont des lettres de change tirées sur l’avenir, etc. Nebenius est un adversaire déterminé du procédé qui consiste, en temps normal, à couvrir les dépenses courantes à l’aide d’emprunt ; mieux valent des impôts lourds. C’est un partisan de l’amortissement dans les bonnes années ; l’amortissement par l’emprunt lui paraît mériter la plus dure condamnation. Il critique le placement obligatoire de l’argent des mineurs en titres de la dette ; il condamne la loterie ; il n’est pas II.

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partisan d’emprunts émis fort au-dessous du pair, dont l’amortissement est plus coûteux et la conversion plus difficile (V. Emprunts publics).

L’État doit être guidé vis-à-vis de ses créanciers non pas seulement par la lettre du contrat, mais par des considérations d’équité. Nebenius a rendu les plus grands services à l’Allemagne dans la question de l’union douanière. Partisan du libre-échange, qui lui paraît une vérité éternelle incontestable, il se voit forcé cependant, par l’état anormal de l’Allemagne, de concéder des tempéraments. Dès 1818, il réclame la liberté de la circulation à l’intérieur et des droits de douane aux frontières seulement. Un mémoire sur la question douanière, élaboré pour le gouvernement badois, fut communiqué à la conférence de Vienne en 1819 (V. List) ; Nebenius y trace un programme qui a été réalisé à peu près entièrement de 1828 à 1866. Nebenius a beaucoup écrit sur le Zollverein (voy. ce mot) en 1833, en 1835, en 1838, en (1840. Roscher trouve que Nebenius a fait sur le terrain de l’union douanière ce que Scharnhorst, Stein, Blucher, Gneisenau, ont fait sur le terrain militaire, qu’on et peut le nommer le père intellectuel du Zollverein. Arthur Raffalovich.

NEGKER (Jacques), le ministre de Louis XVI t a été souvent mis en parallèle avec Turgot, dont il a voulu, un moment, être le rival ; il ne ressemble pourtant à l’illustre économiste ni par les habitudes d’esprit, ni par les actes, ni par les écrits. Si Turgot était, ainsi qu’on l’a prétendu, trop enclin à l’esprit de système, Necker a abusé de l’empirisme ; il a introduit des améliorations utiles dans notre organisation financière et conduit les opérations du Trésor avec une certaine sagesse ; mais, faute de connaissances théoriques, il a retardé la réalisation de réformes préparées avant lui de longue main et, quoiqu’il ait contribué à précipiter la Révolution de 1789, il ne semble avoir compris la portée de ce grand événement, ni quand il fut au pouvoir, ni quand il l’eut quitté. Sa popularité fut extraordinaire, et c’est là encore un côté par lequel il diffère de Turgot ; des gens de basse condition assiégeaient chaque jour sa demeure pour attacher à sa porte des placards louangeurs ; s’il parlait de donner sa démission, la France entière ressentait une commotion profonde ; à Paris, son buste était promené à travers les rues, les théâtres étaient fermés, le peuple réclamait le maintien du « ministre adoré ». Rappelé de Suisse, après le 14 juillet, sur un vœu imoératif de la Constituante, il accom" a