Page:Say - De l’Angleterre et des Anglais.djvu/32

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ginables, pourvu qu’on lui parle de sa gloire et de ses droits maritimes[1].

Il y a sans doute, beaucoup de lumières en Angleterre ; mais à quoi servent les lumières, qu’importe qu’on connaisse la véritable nature et la véritable situation des choses, une fois que les passions sont en jeu ? Ne voit-on pas perpétuellement les joueurs risquer leur argent sur des chances que le calcul leur démontre défavorables ? Mais on finit toujours par payer avec usure, toutes les sottises qu’on fait ; et plus on approche du terme où il faut nécessairement compter, et moins on a de latitude pour commettre impunément de nou-

  1. Cette opinion n’est point inspirée par un préjugé national contraire ; elle est partagée en Angleterre par tout ce qu’il y a de gens instruits et véritablement amis de leur pays. J’en ai vu et entendu un très-grand nombre ; mais ne pouvant citer des conversations, je traduirai ce que dit à ce sujet M. Joseph Hamilton, à qui l’on doit de savantes recherches sur la dette publique, et les plus saines vues pour la prospérité de l’Angleterre. « Si les nations, dit-il, pouvaient tirer quelque profit de l’expérience, si elles jugeaient de nos guerres actuelles avec le même sang-froid que nous jugeons des guerres passées, on serait généralement bien plus pacifique. On ne peut se dissimuler que nous nous sommes fréquemment engagés dans la guerre pour des motifs peu importans, ou pour gagner des points inatteignables ; qu’en général, les plus grands succès n’ont point produit les fruits que nous nous en promettions ; que, sous prétexte de prévenir des dangers futurs et imaginaires, nous avons encouru dès maux présens et réels ; que la colère et l’orgueil national, plutôt que des vues justes et sagement calculées, ont dirigé notre conte duite politique ; que nous nous sommes engagés dans la guerre étourdiment, que nous l’avons soutenue avec obstination, et que nous avons souvent refusé des conditions de paix favorables, pour en accepter ensuite de moins avantageuses ». An inquiry into the national debt of Great-Britain ; pag. 37.