Page:Say - Mélanges et correspondance d’économie politique.djvu/469

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le projet dont Thémistocle n’avait voulu s’ouvrir qu’à lui seul : Le projet de Thémistocle est très-avantageux, dit Aristide aux Athéniens assemblés, mais il est souverainement injuste. Et il le fit rejeter.

On présente ce trait pour faire considérer l’utile comme étant opposé à l’honnête. On se trompe. Ce n’est qu’une comparaison de deux sommes de biens. C’est comme si Aristide avait dit : Le conseil de Thémistocle est utile, mais il est encore plus utile de ne pas le suivre.

En effet, de quoi s’agissait-il ? Le voici : Après la bataille de Salamine et la retraite honteuse de Xerxès, la flotte des Grecs vainqueurs était rassemblée dans le port de Pégaze, sous le commandement des Athéniens qui avaient conduit la guerre. Thémistocle, afin de rendre les Athéniens maîtres de toute la Grèce ; voulait qu’ils profitassent de l’occasion pour incendier les vaisseaux de leurs alliés ; et réduire ceux-ci à l’impuissance. Aristide, en s’opposant à cette insigne trahison, empêchait qu’elle ne soulevât contre Athènes l’indignation de toute la Grèce ; il garantissait Athènes de la rage et de la vengeance des alliés qui auraient éclate à la première occasion favorable ; il évitait enfin l’asservissement d’Athènes elle-même, qui, pour tenir le reste des Grecs dans la dépendance,