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Page:Say - Traité d’économie politique.djvu/16

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PRÉLIMINAIRE.

D’autres considérations non moins délicates se rattachent à ce qui précède. Quelques écrivains du dix-huitième siècle et de l’école dogmatique de Quesnay d’une part, et des économistes anglais de l’école de David Ricardo d’une autre part, sans employer les formules algébriques trop évidemment inapplicables à l’économie politique, ont voulu y introduire un genre d’argumentation auquel je crois, en thèse générale, qu’elle se refuse de même que toutes les sciences qui ne reconnaissent pour fondement que l’expérience[1] : je veux dire l’argumentation qui repose sur des abstractions. Condillac a remarqué judicieusement qu’un raisonnement abstrait n’est qu’un calcul avec d’autres signes. Mais un argument ne fournit pas plus qu’une équation, les données qui, dans les sciences expérimentales, sont indispensables pour parvenir à la découverte de la vérité. La meilleure dialectique aussi bien que le calcul le plus exact, s’ils partent d’une donnée incertaine, arrivent à des résultats douteux. Quand on admet pour fondement, au lieu d’un fait bien observé, un

  1. On sait combien la mécanique rationnelle diffère de la mécanique expérimentale, la seule utile dans la pratique. Il y a quelques parties de la physique, telles que l’astronomie et l’optique, où le calcul peut donner des résultats conformes à l’expérience ; encore n’est-ce que jusqu’à un certain point, et dans les cas où les influences accidentelles ne sauraient changer essentiellement l’état du problème.