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CKr :iJlï AGRICOLE


valeur. Que le syndicat ail inscrit dans ses statuts la clause de la solidarité do ses niom- brcs — ce qui est assez rare — ou qu’il ne l’ait pas inscrite, le simple fait qu’il inler- vii’ut pour avancer des fonds à l’un de ses adliérents est une manifestation évidente de solvabilité du souscripteur, en même tem[)S qu’il ajoute sa sif,’ualure collective à rcllet créé et ofTertà la négociation en banque.

C’est ce puissant élément d’action qu’a utilisé la loi du ii novembre 1894, qui a organisé en Krance le crédit ai^ricole mutuel, et on ne peut qu’approuver le principe posé par l’article premier de cette loi  : « Des sociétés de crédit agricole peuvent être cons- tituées soit par la totalité des membres d’un ou de plusieurs syndicats professionnels agricoles, soit par une partie des membres de ces syndicats  ; elles ont exclusivement pour objet de faciliter et même de garantir les opérations concernant l’industrie agri- cole et effectuées par ces syndicats ou par des membres de ces syndicats. »

Si le syndical agit lui-même comme ban- (juier, et surtout s’il peut ne recourir au réescompte de son portefeuille que lorst^ue le papier n’a plus que trois mois à courir, toutes les difficultés sont levées.

On pourrait encore procéder très simple- ment s’il existait une grande banque (ou plusieurs) qui accepte spécialement le papier des agriculteurs qui lui serait présenté par les syndicats. Malheureusement, on n’a pas voulu ou pas osé créer ce crédit mobilier, analogue au crédit foncier, qui aurait été le grand régulateur nécessaire au mécanisme imaginé. La loi est absolument muette sur ce point.

Le vrai crédit agricole est lié à l’accueil que lui feront les sociétés de crédit par action, qu’on confond avec la haute banque d’autrefois, à moins d’un grand effort finan- cier que ne comporte guère une entreprise à ses débuts. Il ne faut pas perdre de vue que l’intervention des syndicats aura i)0ur effet et d’augmenter la solvabilité du paidcr, et d’en retarder l’escompte à la banque, qui devra le garder eu portefeuille jusqu’à l’échéance.

Le but du crédit mobilier à créer est sim- plement de pouvoir fournir au cultivateur le moyen de se procurer des objets déterminés indispensables à sa culture, tels que semences, engrais, machines, bestiaux, etc., et de ne les payer qu’après réalisation de ses récoltes, en retardant l’échéance jusqu’à ce moment. Pour obtenir la prorogation des échéances et la circulation facile des traites nées à l’occasion de fournitures déterminées, la loi cherche à obtenir sur ces traites trois signa-


tures, c’est-à-dire à ajouter à celle du culti- vateur la signature d’une banijuc organisée par le syndicat agricole dont il fait partie, et celle d’une banque centrale à déterminer ultéricuromcnt, (|ui serait au moins soutenue moralement par l’Élal. D’autre part, on semble prévoir ({ue les sociétés locales se fonderont en assez grand nombre pour servir d’annexé à la grande banque centrale à orga- niser et étendre le marché du papier agri- cole. Mais toute cette organisation complé- mentaire n’est pas indiquée dans la loi, on la trouve seulement ébauchée dans les tra- vaux préparatoires et dans les commentaires auxquels elle a donné li( ;u.

Les dispositions de la loi nouvelle interdi- sent l’émission d’actions pour la formation des sociétés de crédit agricole, le capital ne peut être souscrit que sous forme de parts nominatives prises par les syndicataires eux- mêmes. On a cherché à éloigner de ces sociétés toute pensée de spéculation à gros prolits éventuels. Cette préoccupation est surtout nettement affirmée dans l’article 3 en entier, qui, entre autres prescriptions, porte la suivante  : « il ne pourra en aucun cas être distribué de dividendes entre les membres de la société. »

Ces sociétés toutefois jouissent d’un régime très simple et très favorable à la diminution des charges qui pourraient les atteindre, afin de ne pas surélever le laux de l’intérêt des prêts. On en fait des sociétés commer- ciales, et, en même temps, on les exempte de la taxe sur les valeurs mobilières, et de la patente, comme les sociétés coopératives.

De plus l’article 5 organise pour elles une publicité et une surveillance spéciales. Le juge de paix et le tribunal de commerce ont pour mission de les contrôler, et le public I)eut toujours, en s’adressant aux greffes de ces tribunaux, connaître exactement les opérations et la situation des caisses de crédit. Enfin, les articles 2 et 5 règlent très étroitement les questions de responsabilité des administrateurs et des sociétaires.

Cette loi procède d’une idée juste  ; malheu- reusement elle suppose que tous les agricul- teurs ayant à recourir au crédit sont affiliés à un syndicat ou voudront y recourir, elle crée une branche de crédit et non le crédit agricole en général. Eu l’absence d’une grande banque centrale, il est à prévoir deux conséquences peu encourageantes  : i° les disponibilités des caisses de crédit pourront se trouver rapidement épuisées  ; 2° faute d’exutoire facile, le crédit agricole restera cher.

Pour tourner ces difficultés, la plupart des caisses de crédit agricole fonctionnant déjà


CRÉ