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DU NOYER


rii (cononiif iiolit’uiuo, et à celui de Ch. Coriite, qui lut sou conipa^’uou de lutlc coulre la réaction des Hourhuns.

Elle esl curituisc à lire cclli  ; histoire du Ceiisrur, levaillaut recueil ([ue Cli. (bonite fon- dait <’n 1ÎS14 lors du i)r(,’inii’r l’établissement dfs hourbons, et dont Mignct nous a di-irit la vie si courte et si niouvemcntét  ; ! De IHli à 1815, sept fascicules paraissent  ; ledernier, saisi, l’st mis au i)ilon. Pendant cette année, les deux polémistes tiennent lièrement tète, aussi bien au despotisme royal qu’à la puis- sance éphémère de l’empereur retour de l’ilc l’Elbe. Bientôt ils voient briser leur plume. Ils n’avaient encore défendu, dans ri’tte courte et rude campagne, que la liberté politi(iuc. Les loisirs qu’on leur donne vont leur permettre de devenir, sous l’influence suj^’gestive de J. H. Say,des économistes. Dès 1817, forts de nouveaux arguments, ils reprennent la lutte en fondant un nouveau rc/isc»/- plus large d’idées, qu’ils appellent le Censeur européen. Là, ils soutiennent que la civilisation est intimement liée au progrés industriel, et que ce progrès dépend de la lii)frté. Saint-Simon, qui les suit, prend l’idée, pour en faire ce que l’on sait. Eux, simple- ment, sans charlatanisme tirent les consé- quences logiques du principe  ; c’est-à-dire, la liberté du commerce, la diminution des attributions gouvernementales, et vulgari- sent la formule synthétique de la liberté du travail, sur laquelle Dunoyer va diriger son esprit critique et investigateur pour publier, quelques années plus tard, ses re- marquables études.

Le nouveau Censeur, en effet, ne dure que jusqu’en 1819. Il est alors supprimé. Du- noyer abandonne, pour un temps, la polé- mique, et fait de la science.

Mais son passage à travers la politique de combat lui a montré sous tous ses aspects l’étendue de la science des sociétés. Déjà, d’ailleurs, comme il l’écrira plus tard, il a été préparé aux idées d’ensemble par la lecture de Benjamin Constant et de Montlosier. L’économie politique qu’il tient de J. B. Say demeurera toujours le fond solide de ses doctrines, néanmoins les idées ambiantes le sollicitent. Le Cours d’ Économie politi’/uc de l’économiste russe Storch est publié à Paris en 1823 avec des notes critiques de J. B. Say. Dans cet ouvrage, Storch recherche l’action des influences morales et de ce qu’il appelle, assez improprement, « les produits immaté- riels », sur la civilisation. C’est aussi vers 1824 qu’Auguste Comte publie, après avoir quitté Saint-Simon, son système de Politique positive . L’idée d’une science sociale est dans l’air, encore vague et si indéterminée.


si inquiétante pour l’économie politique pure, (lueJ. B. Say rectifie, [»ar ses critiques judi- cieuses, les premiers tâtonnements.

Dunoyer est plus prudent peut-être que Storch, mais il défend, à coup sur, ses idées avfc plus de jtuissance. A cet égard, on peut afiirmer que, bien avant une école qui ^■in- titule « éthique », Dunoyer a analysé lin- Uuence des facteurs moraux sur le dévelop- pement de la société. Son premier ouvrage, pul)lié en 182  :>, porte ce litre caraclihislique  : Llnduslrie et ta morale considérées dans leurs rapports avec la liberté. C’est, à notre avis, son œuvre capitale au point de vue de l’ori- ginalité des idées. Il refait, en 183U, sous le titre de Nouveau traité d’Économie sociale etc. ce premier livre, et l’étend en plusieurs vo- lumes. La presque totalité de l’édition de 1830 disparait dans un incendie. Enfin, en 1854, il publie la Liberté du Travail qui n’est que l’étude plus poussée, plus mûrie des ques- tions qu’il a traitées déjà sous les deux titres que nous venons d’indiquer. Ces perfection- nements apportés successivement dans la démonstration et l’exposition des idées quilui étaient chères, sufflsaient à montrer le carac- tère de l’homme plein de convictions et de confiance dans la science, si nous ne savions déjà ce qu’avait été au début le polémiste du Censeur.

Mais il est resté fidèle aux idées et à la méthode adoptée dans son premier livre. Il déclare très nettement dans 1 introduction intitulée « Objet de l’ouvrage » qu’il ne veut faire ni un traité de morale, ni un traité d’in- dustrie, mais qu’il entend indiquer l’influ- ence de ces deux choses sur l’exercice de nos facultés, et montrer comment elles donnent naissance à la liberté humaine. « Nous faisons aux arts, dit-il, de merveilleuses applications de la chimie et des autres sciences naturelles, et nous ne songeons point à y appliquer la science des mœurs qui pourrait tant ajouter à leur puissance».

Le livre est original, aussi, par la méthode suivie. Dunoyer y examine successivement, avec les renseignements qu’il pouvait avoir à cette époque, la condition sociale des peuples barbares, nomades, etc., réfute les exagérations de Montesquieu relatives à l’influence du milieu, réduit à néant les sophismes de Rousseau et de Mably, et éta- blit, avec de lumineux développements, que le progrès moral doit suivre le progrès industriel, pour qu’il y ait réellement amé- lioration sociale dans un peuple.

Après la révolution de 1830, il entra dans l’administration, fut successivement préfet de l’Allier, puis de la Somme, et passa au Conseil d’Etat en 1837. II y demeura jusqu’au


DUPIN