Page:Say et Chailley-Bert - Nouveau dictionnaire d'économie politique, supplément.djvu/271

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de donner aux serl’s émancipés des lencs et aussi de laisser se conliiiuer, on tout cas provisoirement, la comiiiunanté paysanne, sous forme de mir, dans toutes les communes qui le désiraient, l/impossibilité pour les individus de i[uilter la communauté avant de lui avoir garanti leurs payements et les lois sur les passeports les empêchaient de s’en aller. En efiet, le mir est maintenant un nouvel esclavage, resté après que le servage proprement dit a été aboli. Là où les paysans ne paient pas comme intérêt du capital de rachat tout le revenu de la terre, c’est-à-dire là où ils possèdent une véritable propriété, ce qui se rencontre surtout dans les environs des grandes villes et sur les bonnes terres noires, la redistribution de la terre est abolie en fait  ; ils n’en veulent pas. Le plus ordi- nairement, depuis l’émancipation, ils doivent, en taxes et en intérêts, plus que ne vaut la terre  ; l’obrok ou lacapitation des personnes n’existe plus  ; même la capilation qui n’était qu’un impôt a été abolie, excepté dans la Sibérie, par le comte Loris Melikof (en 1881, 1883 et 1885)  ; mais la redistribution des terres est un moyen de contraindre tous les individus à participer à l’obligation générale d’un payement  ; en réalité, c’est le servage, et pour le gouvernement qui en profite et pour les paysans qui ne peuvent s’y sous- traire. Seulement, c’est un servage sous une autre forme, servage en partie même très démocratique, mais, par là, ne présentant pas les côtés utiles de la contrainte dans l’ancien servage. On peut aflirmer non sans raison, que, ce qui est l’objet du désir de beaucoup de réformateurs, l’exemption de la saisieappliquée aux petites terres, la //(J/ne^<t’rtd exemption de quelques Etats américains, existe grâce à la commune russe. Cependant cet exemple d’exemption que l’on trouve en Russie, n’est guère à recommander. On sait à quel degré de paresse et d’ivrognerie tom- bent les paysans russes  ; on sait que la moitié de leur temps est perdue en jours de fête, et quelle influence néfaste l’eau-de-vie exerce même sur l’administration communale. Il leur manque avant tout les éléments du progrès matériel, moral et intellectuel. Aussi la meilleure raison que l’on invoque pour le maintien de la communauté, est-elle simple- ment que le caractère russe est si faible que les hommes ne peuvent se gouverner eux- mêmes. Il est certain que l’agriculture a grandement souH’ert sous ce régime et que ni la situation matérielle ni la situation morale ne sont bonnes. Une utile mesure fut cependant l’établissement de la Banque des paysans en 1883  ; de 1883 à 1891, eRe a aidé 294 000 paysans à s’établir et à acquérir un

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million trois quarts d’hectares en leur prêtant les 3/4 de la valeur des terres  ; en l’ologne, grâce à l’assistance ultérieure donnée par un fonds d’utilité publique, les prêts ont pu même s’élever à 00 p. 100 de cette valeur. Cette mesure a contribué eflectivement à répartir sur une plus grande étendue une partie de la population, qui souvent est trop dense.

Eu l’ologae, les redevances et la corvée que devaient fournir les paysans étaient d’ordi- naire fixées par des coutumes, souvent incor- porées dans les actes qu’on appelait inven- taires. En 184G, legouverncment avaitdéfendu d’évincer les paysans qui possédaient au moins trois Morrjen de terres, c’est-à-dire 1 hectare 80 actes. La plupart des paysans devinrent, de 1825 à 1800, censitaires au lieu d’être soumis à la corvée  : en 1861, ISo 000 payaient en argent d’après des contrats fixes, et il n’y en avait que 14 :1000 qui fussent passibles de corvées. En 1801, les grands propriétaires, qui formaient l’Association agricole sous la présidence du comte André Zamoyski, avaient décidé d’introduire, pour tous les paysans, des redevances en argent en lieu et place de la corvée, puis de les faire racheter leurs fermes. L’Association agricole fut dissoute par le gouvernement. Lorsque l’insurrection de 1803 eut éclaté, le gouvernement national secret déclara que les paysans devenaient propriétaires et que le capital serait payé plus tard par le pays. Après que l’insurrection eût été étouffée, le Gouvernement russe décréta lui-même l’ex- propriation d’une manière très radicale, le 2 mars 1864. On l’étendit jusqu’aux terres occupées par les ouvriers et même par des gens de maison, tels que garçons de ferme, jardiniers, forestiers, etc., et jusqu’à leurs maisons quand celles-ci étaient situées dans les villages. Les terres vacantes devaient être distribuées par les soins de l’administration à des personnes qu’elle choisissait, pour les leur donner soit à titre d’usufruit, soit à titre de propriété. L’expropriation ne fut même pas restreinte à l’état des terres paysannes en 1804  ; on se reporta à celui des terres existant en 1840. Les sommes de rachat n’étaient pas suffisantes et les propriétaires furent les premiers à en payer, sous forme d’impôts, une grande partie. Enfin, ils tombèrent, pour bien des choses, sous la dépendance des communes dans lesquelles on organisa les paysans. C’était là un véritable exemple d’une réforme révolutionnaire ac- complie par en haut.

L’ensemble des réformes dont nous venons de parler a eu presque partout, sauf en Russie où les résultats définitifs de la législation particulière qui y est instituée sont encore

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