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de s’y servir du moulin, de la brasserie et de la distillerie du maître, parfois aussi de lui vendre leurs bestiaux et leurs grains  ; c’était là, pour lui, une manière de gain aux dépens des paysans. Cette ol^ligation se trouvait plus à rKsl,en Tialicie et, jusqu’à une époque toute récente, en Roumanie, par exemple. Le grand propriétaire était appelé r06r/f/ /h /(, magistrat, et exerçait, en effet, les fonctions que com- porte ce titre. Dans les pays tchèques et la Silésie, ce fut grâce aux guerres religieuses et à la victoire du gouvernement autocratique, qui maintint en général les privilèges des nobles, que se développa la dépendance per- sonnelle. Le Gouvernement y conserva la difierence entre les terres domaniales, Domi- nicalgruiid, et les terx-es paysannes, Rustical- grund  ; ces dernières restaient en possession des paysans, qui devaient payer des impôts et servir comme soldats. En Silésie, les grands propriétaires payaient aussi des impôts, pour leurs terres domaniales, mais d’après leur propre estimation. Les paysans qui occu- paient le Ruslkalgrund exerçaient un droit héréditaire et étaient en quelque sorte des propriétaires en état de dépendance. Les paysans ne pouvaient être vendus et ils avaient le droit de propriété  ; il étaient donc des serfs, mais non des esclaves. Sous Marie- Thérèse, des ministres progressistes tels que le comte F. W. von Haugwitz (en 1740), le comte von Larisch (commission de 1750) et M. von Blanc s’efforcèrent d’améliorer la situation des paysans. M. von Blanc établit, dans VUrbarialordnung, de 1767, qu’il devait leur être garanti un minimum nécessaire d’existence. M. de Raab recommanda, en 177’o, de morceler les grands domaines, et Fessai en fut tenté, en 1776, avec les domaines de l’État, en Bohême et en Moravie. Les réformes de Joseph II, non seulement l’abolition du servage, mais d’autres encore, qu’il avait décrétées pour toutes ses possessions, n’étaient que partiellement exécutées avant sa mort. Son grand projet d’impôt foncier, d’après lequel 70 p. 100 des revenus nets de- vaient être laissés aux paysans, 12 2/9 p. 100 faire retour à l’État et 17 7/9 seulement au seigneur, fut abandonné, par suite de l’oppo- sition des seigneurs, par son successeur Léopold IL C’est seulement en 1848 que le plus jeune député du Parlement de Vienne, Hans Kudlich, qui est encore aujourd’hui vivant aux États-Unis, proposa l’abolition de toutes les redevances paysannes et que cette proposition fut votée dans la forme que lui donna le chef des conservateurs, M. Lasser. Le principe fut accepté que l’on ne paierait aux propriétaires (qui furent, de leur côté, libérés de certaines^obligationsj que les 2/3


RURALES (CLASSES)

de la valeur de leurs droits  ; de ces 2/3, la moitié, c’est-à-dire 1/3 de la valeur totale, devait être payé par le paysan, 1/4 ou i/6 de la valeur totale, par l’Empire, et 1/4, par la province ou pays de couronne. Ce n’est aussi qu’après 1848 que les réformes ordi- naires furent enfin exécutées en Hongrie. On se rappelle l’insurrection des paysans qui eut lieu en Gallcie contre la noblesse polo- naise, en 1846, et dans laquelle les autorités étaient en partie de connivence. Toute la dépendance fut par suite abolie par le gou- A^erneur impérial, le comte Stadion. Les capitaux de rachat ont monté, dans l’Au- triche, à 307 millions de florins  ; en Hongrie, à 243 millions.

La grande réforme de la Russie, l’émanci- pation des paysans et l’acquisition hérédi- taire de terres, d’ordinaire celles qu’ils culti- vaient déjà pour leur propre subsistance, le plus souvent 2/3 du total, fut accomplie principalement par l’nkase du 19 février 1861, qui concernait les biens privés, sur lesquels vivaient un tiers environ de tous les paysans. Sur les domaines d’État, qui comprenaient un tiers encore des paysans de l’Empire, la dépendance n’était x)as regardée comme un servage proprement dit, mais seulement comme Vascriptio glebae. Sur les domaines d’apanage, la liberté personnelle avait déjà été établie par des décrets de 18o8 et de 1859, et sur les domaines d’Étal, on avait de même aboli, en 1859, le cadastre de travail, d’après lequel les travailleurs devaient payer chacun une capitalion spéciale, en dehors même de toute possession de terres. La réforme terrienne, répondant à celle qui avait été faite pour les domaines privés en 1861, fut exécutée sur les domaines d’apanage en 1863 et sur les plus importants domaines d’État en 1866. Dans la Lithuanie et les provinces de l’Ouest anciennement polonaises , la dissolution des relations qui existaient entre les grands propriétaires et les paysans eut lieu à la suite de l’insurrection polonaise favorisée par les grands propriétaires  ; l’État se substitua entièrement à ces derniers par les ukases de 1863 et 1867, l’on donna aux l^aysans des conditions plus favorables que d’ordinaire et on confia des terres mêmes à ceux qui n’en avaient pas auparavant. L’n arrangement analogue a eu lieu enfin pour les propriétaires privés sur les domaines d’Etat en 1886. Dans toutes les propriétés de Russie, où existaient encore des corvées ou des fermages, l’introduction de la propriété paysanne fut rendue obligatoire en 1881. Le montant total du rachat des paysans monte à 880 millions de roubles.

On était tombé d’accord sur la nécessité


KURALES (