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D’UNE CHATTE ANGLAISE.

son innommable, agitant ses barbes, me regardant et fermant parfois les yeux. Puff était, dans le beau monde des Chats anglais, le plus riche parti pour une Chatte née chez un ministre : il avait deux valets à son service, il mangeait dans de la porcelaine chinoise, il ne buvait que du thé noir, il allait en voiture à Hyde-Park, et entrait au parlement. Ma maîtresse le garda chez elle. À mon insu, toute la population féline de Londres apprit que miss Beauty du Catshire épousait l’illustre Puff, marqué aux couleurs d’Autriche. Pendant la nuit, j’entendis un concert dans la rue : je descendis, accompagnée de milord qui, pris par sa goutte, allait lentement. Nous trouvâmes les Chattes de la Pairie qui venaient me féliciter et m’engager à entrer dans leur Société Ratophile. Elles m’expliquèrent qu’il n’y avait rien de plus commun que de courir après les Rats et les Souris. Les mots shocking, vulgar, furent sur toutes les lèvres. Enfin elles avaient formé pour la gloire du pays une Société de Tempérance. Quelques nuits après, milord et moi nous allâmes sur les toits d’Almack’s entendre un Chat gris qui devait parler sur la question. Dans une exhortation, qui fut appuyée par des Écoutez ! Écoutez ! il prouva que saint Paul, en écrivant sur la charité, parlait également aux Chats et aux Chattes de l’Angleterre. Il était donc réservé à la race anglaise, qui pouvait aller d’un bout du monde à l’autre sur ses vaisseaux sans avoir à craindre l’eau, de répandre les principes de la morale ratophile. Aussi, sur tous les points du globe,