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D’UN MOINEAU DE PARIS.

reine tient son pouvoir de Dieu. Nous ne pourrions pas plus exister en corps social sans elle, que tu ne pourrais voler sans plumes. Elle est notre joie et notre lumière, la cause et la fin de tous nos efforts. Elle nomme une directrice des ponts et chaussées qui nous donne nos plans et nos alignements pour nos somptueux édifices. Elle distribue à chacun sa tâche selon ses capacités, elle est la justice même, et s’occupe sans cesse de son peuple : elle le pond, et nous nous empressons de le nourrir, car nous sommes créées et mises au monde pour l’adorer, la servir et la défendre. Aussi faisons-nous pour les petites reines des palais particuliers et les dotons-nous d’une bouillie particulière pour leur nourriture. À notre reine seule revient l’honneur de chanter et de parler, elle seule fait entendre sa belle voix.

— Quelle est votre reine ? dit alors le prince d’Euglosse-Bourdon.

— C’est, dit l’Abeille, Tithymalia XVII, dite la Grande-Ruchonne, car elle a pondu cent peuples de trente mille individus. Elle est sortie victorieuse de cinq combats qui lui ont été livrés par d’autres reines jalouses. Elle est douée de la plus surprenante perspicacité. Elle sait quand il doit pleuvoir, elle prévoit les plus rudes hivers, elle est riche en miel, et l’on soupçonne qu’elle en a des trésors placés dans les pays étrangers.

— Ma chère, dit le prince d’Euglosse-Bourdon, croyez-