Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/154

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Le jour que Dom Louis fut tué par vos mains.

Ces sentiments sont-ils fort bas ? Fort inhumains ?

Et savons-nous aussi porter loin la bravoure ?

Dom Pedre

Ô Dieu ! Sera-ce à moi d'avoir toujours à courre.

Mon ennemi que j'aime, et qu'il faudra pourtant [1265]

Que je perde, ou périr moi-même en combattant,

Si vous me délivrez ; est-ce qu'il vous importe

Que ce soit tout à l'heure, ou demain que je sorte ?

Le Comte

Il m'importerait peu que ce fût à l'instant,

Si ce n'est qu'à ma gloire, il est fort important [1270]

Quand vous serez sorti, de vous chercher moi-même.

Et cependant il faut par un malheur extrême,

Que le reste du jour, quand vous ne me chercheriez

Je me cache, où jamais vous ne me trouveriez ?

Quelle hâte avez-vous de sortir tout à l'heure ? [1275]

Attendez à demain.

Dom Pedre

Il m'importe, ou je meurs.

Le Comte

Faisons donc quelque trêve ?

Dom Pedre

Oui, donnez-moi la main.

Mais à condition qu'elle finit demain.

Le Comte

Il faut querelle à part, que de mes bras j'embrasse

Mon plus cruel ennemi.

Dom Pedre

Quelle étrange disgrâce ! [1280]

Faut-il en même temps, vous aimer vous haïr ?

Mais mon père.