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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/180

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Que rien ne me paraît aimable comme il est, [155]

Après lui dans la Cour personne ne me plaît,

Soit qu'il soit trop aimable, ou moi trop susceptible

D'un amour, qu'à chasser j'ai fait tout mon possible,

Car je l'ai vu depuis, cet aimable vainqueur ;

Mais je ne l'ai pu voir qu'aux dépens de mon coeur, [160]

Mais je ne l'ai pu voir sans en être amoureuse,

Et de plus, Béatrix, jalouse, et furieuse ;

Ne désapprouve point ces mouvements jaloux

Je l'ai vu depuis peu dans l'Église à genoux,

Discourant en secret avec une inconnue, [165]

Que mon Page suivit jusques dans cette rue,

Et c'est pourquoi j'y viens depuis deux ou trois jours,

Et ce qui m'y fait faire avec toi tant de tours,

Mais j'aperçois venir le plus fâcheux des hommes,

Je suis au désespoir, s'il connaît qui nous sommes, [170]

C'est un homme choquant, un homme sans raison.

BÉATRIX

Entrons sans marchander dedans cette maison,

J'en vois sortir, me semble, une femme assez belle.

LÉONOR

Mon Dieu ! Sans la connaître.

BÉATRIX

Et vous mangera-t-elle ?

Allez, allez, Madame, et parlez hardiment, [175]

Il ne vous en saurait coûter qu'un compliment.


Scène II

LÉONOR

Madame, n'ayant pas l'honneur de vous connaître

Vous n'approuverez pas ma liberté, peut-être,

Mais vous ne pouvez pas avoir tant de beauté

Que vous n'ayez beaucoup de générosité : [180]

Ce Cavalier qui vient me poursuit, il m'importe

D'éviter son abord, je crois qu'à votre porte

Je rencontre à propos un lieu de sûreté,

Où je ne craindrai point son importunité.

HÉLÈNE