Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/190

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Et jure son grand Dieu, vous faisant les yeux doux,

Que si vous l'aimez bien, elle est folle de vous ; [410]

Mais que plusieurs raisons qu'elle ne peut apprendre

Malgré tout son amour, la font encore attendre,

Et moi qui vois bien clair, Monsieur je vous apprends

Que le bien de votre oncle est tout ce qu'elle attend,

Non que vous déplaisiez à cette dame chiche, [415]

Mais elle aime le bien, et vous n'êtes pas riche.

DOM DIÈGUE

Je serai riche un jour quand mon oncle mourra,

Mon Dieu quand mourra-t-il ?

ROSQUEPINE

Le plus tard qu'il pourra,

Mais je veux qu'il soit mort, vous savez qu'un naufrage

Peut vous faire déchoir de cet ample héritage, [420]

Et la Flotte qui vient que l'Hollandais attend,

Et que le plus souvent vous savez bien qu'il prend,

Si Dieu veut qu'elle prenne Amsterdam pour Séville,

Vous passerez fort mal le temps en cette ville ;

Et je veux qu'on me pende en cas que cela soit, [425]

Si chez elle jamais l'ingrate vous reçoit,

Toute la subsistance est, peu s'en faut, tarie,

Vous sollicitez mal votre Commanderie,

Très inutilement vous tirez comme on dit,

De la poudre aux moineaux, et donnez à crédit [430]

Votre temps, dont jamais on ne vous tiendra compte.

Vous en crevez de rire, et moi j'en meurs de honte.

DOM DIÈGUE

Es-tu mon Pédagogue ou bien mon Gouverneur ?

ROSQUEPINE

Je suis votre Écuyer, de plus, homme d'honneur.


Scène II

.

FILIPIN

, entre en chantant.

Que la Tour de Valladolid tombe sur toi, [435]

Qu'elle tombe, et te tue, que m'importe à moi ?

DOM DIÈGUE