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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/224

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Ne vous parjurez point, je crois bien le contraire.

Puisque vous m'aimez bien, comment pouvez-vous faire

De semblables desseins, encore devant moi ?

DOM DIÈGUE

Je fais voir mon amour, faisant ce que je dois,

C'est vous mériter peu que d'être sans courage. [1145]

LÉONOR

Ô l'étrange discours à quoi l'amour m'engage !

Je rougis, ha ! Mon Dieu, ne me regardez point :

J'aime bien Dom Diègue, et je l'aime à tel point,

Que pour le conserver, je ne veux plus rien dire,

Je n'en ai que trop dit : adieu, je me retire. [1150]

DOM DIÈGUE

Ha ! Madame, achevez le discours commencé :

Il était obligeant, mais vous l'avez laissé.

Puisqu'en si peu de temps vous changez ma fortune ;

C'est après avoir plu, signe que j'importune :

Je ne le cèle point, d'un tel mal combattu [1155]

Mon coeur désespéré manquera de vertu.

Je redoute bien moins une âme de Tigresse,

Que l'inégalité d'une belle Maîtresse.

De ce charmant discours, qui vous a détourné ?

Il promettait beaucoup, mais il n'a rien donné. [1160]

LÉONOR

S'il a promis beaucoup, je tiendrai sa promesse,

Si j'avais moins d'amour j'aurais moins de faiblesse :

Puisque votre courage étonne mon amour,

Ne se hasarder point, c'est bien faire sa cour.

DOM DIÈGUE

Si ce grand Fanfaron par malheur allait battre [1165]

Mon laquais, il faudrait l'assommer ou combattre ;

Je hasarde bien moins, empêchant son dessein.

LÉONOR

On ne conserve pas un jugement bien sain,