Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Stefanie.

Le coquin m’a jouée, il faut aller après.

Olivarès.

Mon bras est impuissant, où le sont vos attraits.

Stefanie.

Il a laissé tomber, en fuyant, quelque chose,
Va-t’en le ramasser.

Olivarès.

Va-t’en le ramasser.C’est une lettre close.

Stefanie.

Apporte.

Olivarès.

Apporte.Ou c’en sont deux en un même paquet.

Stefanie.

Il faut voir ce que c’est, romps vîte le cachet.
La date est d’aujourd’hui, la lettre est fraîche faite,
Nous allons découvrir quelque affaire secrète.

LETTRE.

Mon frère,

Je suis dans Madrid, et qui pis est, j’y suis pour me marier. J’ai grand’peur qu’un bourreau de beau-pére ne m’aille tromper, et ne m’ait promis plus de beurre que de pain. Je ne me mouche pas sur ma manche, comme vous savez, et il en faudrait venir au coupe-gorge. Je vais donc faire la guerre à l’œil ; car de deux accidens il faut éviter le pire. Informez-vous de ses vie et mœurs de votre côté, comme je ferai du mien, et me sachez bon gré de la confidence. Je vous adresse une lettre que j’écris à ma future épouse, afin qu’elle ne me soupçonne pas d’être à Madrid. Le dessus de la lettre vous apprendra sa demeure.

Louize.

A-t-on jamais écrit plus extravagamment,
En des termes plus bas, avec moins d’agrément ?