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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/300

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JODELET, seul.

Toi qui vient d'entrer là-dedans,

Qui bat les gens malgré leurs dents,

Et m'as frappé sans dire gare,

Sais-tu ce que je te prépare ?

Je te dis charitablement, [1255]

Si tu le sais, que nullement

Tu n'aies à passer cette porte,

Car Monseigneur Satan m'emporte ;

Et je le dis de sens rassis,

Si tu sors, si je ne t'occis. [1260]

J'enrage que je ne t'étrangle

Et j'enrage que je ne sangle

Au travers de ton chien de nez

Estramaçons bien assénés.

Au reste tu me peux bien croire, [1265]

Je suis tout sûr de la victoire ;

Car j'ai fait des provisions

Pour semblables occasions.

J'ai contre toute hémorragie,

Pierre de grande énergie, [1270]

Billet contre le coup fourré,

Coup dangereux s'il n'est paré,

Tous les jours presque je m'exerce

Et sur la quarte et sur la tierce,

Et prends en même temps leçon [1275]

Pour et contre l'estramaçon ;

Je suis bien sûr dans la parade ;

J'ai fait forger une salade

À l'épreuve du fauconneau,

Dont je doublerai mon chapeau. [1280]

À l'heure même on m'accommode,

(Et peut-être en viendra la mode,)

Une cuirasse à mon pourpoint,

Qui ne paraîtra du tout point.

Je suis nanti d'une rondache [1285]

À l'épreuve du coup de hache ;

Et quant à darder le poignard,

J'en fais tout ainsi que d'un dard.