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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/467

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d. alvare.

Cependant les habits ne se dépouillent pas.

d. japhet.

Vous me pardonnerez, je vais tout mettre bas.

d. alvare.

Vous marchandez beaucoup.

d. japhet.

                                          Qu’à mes habits ne tienne,
Qu’on n’épargne une peau douce comme la mienne ;
Qu’ainsi ne soit, voilà mon fidéle chapeau :
Mais voulez-vous donc tout, même jusqu’à ma peau ?
Vous donnerai-je aussi les habits qui me couvrent ?

d. alvare.

Que cent coups de cailloux tout-à-l’heure l’entr’ouvrent.

d. japhet.

Messieurs, ne parlons plus de lapidation,
Je m’en vais achever la spoliation,
Et vous acheverez de plier ma toilette.

d. alvare.

Le malheureux me raille, il faut que je le mette
De son balcon en bas ; donne-moi ce fusil,
Je veux faire un beau coup…

d. japhet.

                                             Messieurs, que vous faut-il ?
Ce n’est donc pas assez d’être nud en chemise,
Et la plainte au chétif ne sera pas permise ?
Ma foi ! c’est bien à moi de faire le railleur,
Mort de peur, mort de froid, et pris pour un voleur :
Laissez-moi donc en paix, attiédissez vos biles,
Et que mes vêtemens puissent vous être utiles ;
Voilà mon haut-de-chausse, et mon pourpoint aussi.

d. alvare.

C’est trop, c’est trop. Adieu, seigneur, et grand-merci.

d. japhet.

C’est trop, c’est trop, ma foi ! c’est moi-même qu’on raille.
Me voilà nud pourtant, peste soit la canaille !
Si je n’avois été si haut embalconné,
Cent coups au-lieu d’habits je leur eusse donné.
Mais mon ange est long-tems.