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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/468

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Scène VI.

UNE DUÉGNE, DOM JAPHET.
une duégne.

                                         La nuit est fort obscure,
Gare l’eau.

d. japhet.

                      Gare l’eau ! bon dieu, la pourriture !
Ce dernier accident ne promet rien de bon.
 ! chienne de duégne, ou servante, ou démon,
Tu m’as tout compissé, pisseuse abominable,
Sépulcre d’os vivans, habitacle du diable,
Gouvernante d’enfer, épouvantail plâtré,
Dents et crins empruntés, et face de châtré !

la duégne.

Gare l’eau.

d. japhet.

                   La diablesse a redoublé la dose ;
Exécrable guenon, si c’étoit de l’eau rose,
On la pourroit souffrir par le grand froid qu’il fait ;
Mais je suis tout couvert de ton déluge infect,
Et quand j’espérerois le retour de ma belle,
Étant tout putréfait, que ferois-je avec elle ?
Il faut céder au tems, c’est assez pour un coup :
J’ai fort mal réussi ; mais j’aurai fait beaucoup,
Si je puis, descendant l’échelle que j’accroche,
Garantir mon cher corps de chûte ou d’anicroche.
Que maudit soit l’amour, et les balcons maudits,
D’où l’on sort tout couvert d’urine et sans habits !
Que le métier d’amour est un rude exercice !