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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/587

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ma honte?

   Et si vôtre secours me veut abandonner,
   Quel remede assez prompt y pourray-je donner?
   Mais sçait-on le destail d'une telle avanture;

LICAS.

   Ce que j'ay pû tirer d'un Peuple qui murmure,
   Et vous sçavez, Seigneur, ce qu'on en peut tirer,
   C'est ce qu'en peu de mots je vais vous déclarer.
   Les troupes d'Orosmane en terre descendues,
   Se sont en divers corps dans l'Isle répanduës,
   L'on a pris Amatonte, & le plus fort de tous,
   Que les autres suivront, marche, & vient droit à nous.

NICANOR.

   C'est assez.



Scène III


NICANOR, ELISE, LICAS.


NICANOR.

                Sçavez-vous qu'Amatonte est surprise,
   Madame, & qu'on s'en prend à la Princesse Elise;
   Qu'on dit qu'elle s'entend avec nos Ennemis,
   Puis qu'elle a refusé de couronner mon fils;
   Que par ce fier refus une guerre impreveuë,
   Trouve Cypre allarmée, & de Roy dépourveuë,
   Et qu'à nous qui pourrions les esprits rasseurer,
   Elle ne permet pas seulement d'esperer?

ELISE.

   Je permets d'esperer au vainqueur du Corsaire.

NICANOR.

   Mais Amintas vaincu, perd l'espoir de vous plaire,
   Ce Prince qui vous ayme, & que vous méprisez,
   Pour conserver un bien que vous luy refusez,
   Pour deffendre la Cypre à d'autres destinée,
   Ira-t'il exposer sa vie infortunée?
   Ha! puisqu'à son amour l'espoir est deffendu,
   Que Cypre soit perduë autant qu'il est perdu.

ELISE.

   Ce n'est pas la saison de faire des reproches,
   Quand de nos ennemis nous craignons les approches,