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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/591

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NICANOR.

   Qu'aveuglement tu suis une amour insensée!

AMINTAS.

   Vous m'en avez Seigneur, inspiré la pensée.

NICANOR.

   On change de dessein selon l'utilité.

AMINTAS.

   On ne suit pas ainsi l'exacte probité.

NICANOR.

   Ha! ne te pique point de ces vertus frivolles,

AMINTAS.

   C'est perdre temps, Seigneur, en de vaines parolles,
   Tandis que de Paphos tout le peuple estonné,
   Se croit avec raison de nous abandonné.
   Donnons pour son salut les ordres necessaires;
   Envoyons des partis observer les Corsaires.
   Tandis que vous veillez à deffendre nos Murs,
   Employez ma valeur aux travaux les plus durs.
   Rendez-moy digne enfin de ces hautes pensées,
   Que vos conseils hardis dans mon ame ont laissées,

NICANOR.

   Allons donc faire encore des ingrats dans Paphos.



Scène VI


AMINTAS, CRITON.


AMINTAS.

   Prens mes armes, Criton, & deux de mes chevaux,
   Sur le bord de la mer je te joins dans une heure;
   Mais ne te lasse point de ma longue demeure.
   Les Princes éclairez, & suivis en tous lieux,
   Ont dans leurs actions à tromper bien des yeux,
   Et ce monde empressé qui ne les quitte guere,
   Les rend plus malheureux que ne croit le vulguaire,
   Je veux aller combattre Orosmane en son Camp;
   Nous sommes peu, Criton, pour un dessein si grand