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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/596

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J'ay veu cent fois au fort de la tempeste,

     L'onde aux Cieux se méler;
   Le foudre étincelant, fendre, abbatre, brûler,
     Des voiles, des masts sur ma teste.
     Je l'ay veu des rocs ébranler,
   Et faire mille éclats du débris de leur faiste.
   Cent fois dans ma noble fureur,
     Portant la guerre & la terreur,
     Aussi loin qu'alloit mon courage,
     J'ay veu la mort s'opposer à mes pas;
     Mais qu'un visage plein d'appas,
     Fait souvent trembler d'avantage,
     Que le foudre, que le naufrage,
     Que la guerre, & que le trépas!



Scène II


OROSMANE, AMINTAS.


OROSMANE.

   Approche mon vainqueur; mais vainqueur sans combattre.
   Viens voir si dans ses maux mon coeur se laisse abbatre,
   Ou plustost si mes fers sont aisez à briser.
   O des Princes ingrats le plus à mépriser,
   Viens pour ne me plus craindre, estre mon homicide;
   Tu peux bien estre lâche, ayant esté perfide.

AMINTAS.

   Je ne reconnois plus ce vainqueur moderé,
   De qui j'avois tantost le courage admiré.

OROSMANE.

   Et je reconnois moins ce vaincu magnanime,
   De qui le faux éclat a surpris mon estime.

AMINTAS.

   Je suis tel que j'estois quand tu fus mon vainqueur.

OROSMANE.

   Manquer à sa parole, est-ce avoir de l'honneur;
   Quand ton Pere insolent & fier de ma disgrace,
   A déchaisné sur moy toute une