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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/77

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Scène IV

BLANCHE, D. SANCHE, D. BLAIZE.
Blanche.

Oses-tu bien tenir de semblables discours
À qui te voudroit voir à la fin de tes jours ?
Oses-tu m’éprouver par de lâches atteintes,
Et me choisir encor pour l’objet de tes feintes ?
J’avois d’abord puni, comme tout autre eût fait,
D’une juste colére un amour indiscret ;
Mais depuis soupçonnant que tu feignois ta flame
Pour tenter ma vertu, pour éprouver mon ame :
Car qui jamais eût cru qu’un amour criminel,
Eût banni de ton cœur le respect fraternel ?
J’ai feint de compatir à ta peine insensée ;
J’ai feint que ton amour m’avoit l’âme blessée ;
Tes yeux m’ont vu rougir, et m’ont vu soupirer,
Et ma feinte bonté t’a permis d’espérer ;
Mais maintenant je sais que ton cœur est capable
Du crime le plus noir et le plus détestable :
Sache aussi que le mien est aussi vertueux,
Que le tien est ingrat, lâche, et présomptueux ;
Et quand il deviendroit d’un crime susceptible,
Qu’il ne seroit jamais à ton amour sensible,
Sache qu’il chérira ton frére tendrement,
Et qu’il te haïra toujours mortellement.

Elle s’en va.
D. Blaize, pensif.

Qu’en dites-vous cadet ? Blanche et vous, ce me semble
Quoi qu’aimable tous deux, n’êtes pas bien ensemble.
Ordugno !

Ordugno.

Ordugno !Monseigneur ?

D. Blaize.

Ordugno ! Monseigneur ?Et c’est parler cela ?
C’est comme il faut traiter un coquet Quinola.
Ô la maîtresse-fille et Porcie et Lucréce,
Ne l’ont jamais value avecque leur prouesse :