Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/108

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Armes que sans peine il conquit,
Sur un que sans peine il vainquit,
Mais armes un peu trop payées
Pour n’avoir été qu’essayées !
Sitôt que je le vis ainsi,
Je fus d’abord un peu transi ;
Mais, reprenant bientôt courage,
Je lui tins ce hardi langage :
"Si vous êtes de Dieu, parlez,
Et si du diable, détalez.
— Je suis Hector le misérable,
Dit-il d’une voix effroyable.
— Vous soyez le très bien venu",
Lui dis-je après l’avoir connu ;
Et puis j’ajoutai, ce me semble.
"Cependant qu’ici chacun tremble,
Mon cher monsieur, en quelle part,
Vous, qui nous serviez de rempart,
Avez-vous, bien loin de l’armée,
Fait tort à votre renommée ?
Sans doute l’on en médira :
Est-ce la peur des Libera
Et des fréquentes funérailles
Qui vous fait quitter nos murailles ?
Au nom de Dieu, songez à vous,
Et ne craignez plus tant les coups,
Et me dites, cher camarde,
D’où vous venez ainsi maussade,
Comme un corps qui pend au gibet,
Et tout crotté comme un barbet.
A votre mine tout étrange
Vous paraissez un mauvais ange.
Je hais la fréquentation
De ceux de cette nation ;
C’est pourquoi dépêchez, beau sire,
Ce que vous avez à me dire,
Autrement je m’en vais crier,
Car je commence à m’effrayer."
Lors, me semble, il ouvrit la bouche,
Et, me regardant d’un oeil louche,
Il