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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/127

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Du roi Priam ; mais ce malheur
Fut récompensé par l’honneur.
Chevrons dorés, poutres dorées,
Ne sont non plus considérées
Qu’un gros bâton, bûche ou fagot.
Un caillou va comme un lingot.
Chaises, fauteuils, tables, bancelles,
Vases, cabinets, plats, vaisselles,
Bref, tous les meubles précieux,
Jusqu’aux simulacres des dieux,
A la foule se viennent rendre
Au soldat qui vient pour les prendre,
Mais plus vite qu’il ne voudroit.
Je savais un certain endroit
Où, par une porte secrète,
On pouvait entrer en cachette
Et sortir sans être aperçu.
Ce lieu de tous n’était pas su :
C’est par là que dame Andromaque,
Devant cette funeste attaque,
Le vieil beau-père visitait,
Son Astyanax lui portait,
Dont dame Hécube était ravie :
Elle l’aimait plus que sa vie ;
Quand petit encore il était
En ses bras souvent le portait,
Et souvent, de ses mains royales,
Lui remuait ses langes sales,
Et cette bonne mère-grand,
Quand il devint un peu plus grand,
Faisait avec lui la badine,
L’entretenait de Mélusine,
De Peau-d’Ane et de Fierabras,
Et de cent autres vieux fatras.
Cet enfant était son idole,
Et la vieille en était si folle
Qu’avec lui troussant hoqueton,
Entre les jambes un bâton,
Elle courait la prétentaine
Jusqu’à perdre souvent l’haleine.