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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/138

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Dont chaque mari fut un sot,
Qui se cachait sans dire mot ;
Je veux dire la fausse Hélène,
Si funeste à la gent troyenne.
Redoutant le juste courroux
Et des Grecs et de son époux,
Elle s’était là retirée
Toute seule, et mal assurée.
Lors je dis : "La louve qu’elle est
(Dieu me pardonne, s’il lui plaît ! )
Reverra la Lacédémone,
Et là portera la couronne,
Tandis que des pauvres Troyens,
Ou brûlés, ou mangés des chiens,
Il ne restera sur la terre
Que ceux qu’y laissera la guerre,
Pour mourir de froid et de faim,
Et pour y demander leur pain.
Non, non, la raison me conseille
De couper le nez et l’oreille
A cette maudite putain,
A ce malencontreux lutin,
Qui tant de sang a fait répandre,
Par qui notre ville est en cendre,
Et les Troyens morts ou captifs,
Hormis ceux qui sont fugitifs.
Dieu sait comme elle fera pièce,
Quand elle sera dans la Grèce,
De Priam et de ses enfants,
Et fera rire à nos dépens
Les destructeurs de notre empire ;
Je pense déjà l’ouïr rire,
Et bien faire le goguenard,
Ménélaüs, le franc cornard !
Elle a causé notre ruine :
Elle en perdra nez et narine ;
Oui, je m’en vais lui retrancher
La peine de se plus moucher.
Il est vrai, frapper une femme
A bien quelque chose d’infâme :