Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/188

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

De laquelle, la larme à l’oeil,
Je baisai les gonds et le seuil.
Je fus reçu dans cette ville,
D’une façon toute civile
Les moindres gens de nos vaisseaux
Quittèrent le séjour des eaux.
Onc ne fut telle mangerie !
Jusqu’à la moindre hôtellerie,
De mon monde tout regorgea,
Chacun son soûl but et mangea.
Dans le palais les plus notables
Furent sur magnifiques tables
Servis de mets très délicats,
Et pouvaient en prendre les plats,
Comme aussi les tasses dorées,
Nappes et serviettes ouvrées.
Nous passâmes là quelques jours
Que nous ne trouvâmes pas courts,
La tristesse de nous bannie.
Il n’est si bonne compagnie
Qui ne se sépare à la fin.
Je dis donc au sacré devin
Que le vent paraissait bien sage,
Et nous promettait bon voyage,
Mais, devant que de le quitter,
Que j’avais à le consulter
Pour m’éclaircir de quelque doute.
Il me dit : « Commencez, j’écoute. »
Je lui dis ces mots à peu près :
"Par un commandement exprès
Des dieux et de la destinée,
Ma troupe doit être menée
Dans le pays ausonien.
Là le pauvre peuple troyen
Doit avoir, après sa misère,
Une fortune bien prospère,
Et, comme on dit, vivre à gogo.
Mais une laide Céléno,
Une malencontreuse Harpye,
Comme si c’était être impie