Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Nous allions fort bien nous fourrer,
Sans nous en pouvoir retirer,
Tout droit dans la mer défendue
Où si souvent nef s’est perdue ;
Mais, quand on a peur, pour un peu
On se jetterait dans un feu,
Et nous craignions Charybde et Scylle
Moins que ces monstres de Sicile.
Boréas vint tout à propos,
Qui nous mit l’esprit en repos ;
Il venait de devers Pélore.
Il me semble qu’il souffle encore,
Tant j’ai gardé le souvenir
Du bien qu’il nous fit à venir.
Ce bon vent, des vents le plus sage,
Nous porta par delà Pantage,
Le golfe dit mégarien,
Et le bas Thapse, en moins de rien.
Le pauvre Grec Achéménide
Nous servit en ces lieux de guide,
Et me disait tous les endroits
De la côte, en son ithaquois,
Dont j’eus grand plaisir de m’instruire.
Vis-à-vis du fleuve Plemmyre,
Assez près du fameux détroit
Où le nocher le plus adroit
A peur de Charybde et de Scylle,
On rencontre une petite île
Dont Ortygie est le vieil nom,
Autrefois ville de renom,
Dont madame la Renommée
Chose bien étrange a semée :
Maint auteur, animal mentant,
Nous donnant pour argent comptant
Que le fleuve Alphéus d’Elide,
Sans lanterne, flambeau, ni guide,
Par certain sentier souterrain,
Lui, ses poissons et tout son train,
Y va voir la source fameuse,
Aréthuse, ou bien Arétheuse,