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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/241

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Car de cet honnête nom-là
Dame Didon nomma cela ;
Mais je sais bien que quelques prudes
Lui donnèrent des noms plus rudes,
Et, nonobstant la qualité,
Qu’à Tyr l’on a bien caqueté,
Tant de Didon que de son hôte.
Certes, jamais pareille faute
Ne causa pareil repentir,
Et la pauvre Infante de Tyr
En mourut, dont ce fut dommage.
Que maudit soit son mariage,
Et maudite soit sa vertu !
Je veux qu’il se soit ébattu
Avec elle, Aeneas de Troie
Ce n’est qu’une action de joie,
Et laquelle ne devait pas
Produite un funeste trépas.
En fallait-il cesser de vivre !
La suive qui la voudra suivre !
Je connais de fort bons esprits
Qui ne voudraient pas à tel prix
Acheter de la renommée,
Qui n’est, ma foi ! qu’une fumée.
Autre renommée il y a,
Laquelle partout publia
Que Didon avec maître Enée
Etait jointe par hyménée.
Cette renommée est un mal,
Ou plutôt un traître animal,
Qui ne se peut tenir en place ;
Il n’est malice qu’il ne fasse ;
Il est menteur et médisant,
Et prend force chemin faisant.
Dans les commencements il semble
Que de peur en parlant il tremble,
Puis après à tout il se prend,
Et de petit devient si grand
Qu’il s’étend par toute la terre.
On dit qu’après l’étrange guerre