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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/278

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On la vient voir de toutes parts
Pour des pommades, pour des fards,
Pour faire des maquerellages,
Pour rentraire des pucelages,
Pour trouver de l’argent perdu,
Pour de la corde de pendu
Dont elle fait ses maléfices :
Toutes les nuits dans les justices
Elle va l’échelle planter.
Son démon lui vient rapporter
Tout ce qui se fait sur la terre,
Tant en la paix comme en la guerre,
Sur son dos la porte en tous lieux,
Et la rend invisible aux yeux.
Elle sait nouer l’aiguillette ;
Bref elle commande à baguette
A tous les habitants d’Enfer,
Même à monseigneur Lucifer.
C’est en cette femme savante
Que je mets toute mon attente.
O chère sœur ! c’est malgré moi
Que je m’en sers, en bonne foi
C’est une chose défendue ;
Mais toute espérance est perdue
De fléchir le prince troyen,
Si ce n’est par ce seul moyen
Fais donc mettre sur une pyre
Les choses que je te vais dire :
Son bonnet de nuit, ses chaussons,
Une paire de caleçons,
Sa bigotelle et sa pincette,
Qu’il a laissés sur ma toilette,
Son épée à faire combat,
Et le détestable grabat,
Où je me suis abandonnée
A ce fils de putain d’Enée.
La sorcière dit qu’autrement
Ne se peut finir mon tourment ;
Que tout ce qui fut à l’infâme
Doit être purgé par la flamme,